2016-C-Lc 8, 4-15- samedi 24e semaine ordinaire - chercheur de sol
Année C: samedi de la 24e semaine ordinaire (litco24s.16)
Luc 8, 4-15 ; 1 Co 15, 35-37, 42-49 ; Jésus, un patient et courageux chercheur
Nous connaissons très bien cette parabole. Elle nous parle de Dieu. Elle parle de nous, de notre réception de la Parole, et comment nous la vivons.
Je vous propose un autre regard. Celui du chercheur qui avant de lancer un nouveau produit sur le marché, doit faire de multiples essais plus ou moins probants, se soumettre à une série d'expérimentations. Que d'études préliminaires sont nécessaires avant la mise en marché d'un produit. Que de frustrations avant d'obtenir des résultats satisfaisants. Tout nouveau médicament, toute nouvelle construction ou création requiert des mois, voire des années de tentatives diverses avant d'arriver à maturité.
Ça prend du temps au chercheur pour trouver les ingrédients nécessaires, les mixer afin d'obtenir les meilleurs résultats. Ça prend du temps aux artistes pour présenter une oeuvre architecturale qui frappe par sa beauté et sa simplicité. Ça prend plusieurs études sur la qualité du sol avant de construire une maison, une route. On n'y arrive pas dès la première ébauche. On voit cela avec le projet du train électrique à Montréal.
Et si notre semeur prenait le même chemin, celui d'essais et d'erreurs. De ratés et de succès. Tout chercheur reconnait qu' avant de commencer un projet, il lui faut du courage, de l'audace, de la patience, de la déter-mination. La recherche n'est pas pour un tempérament impulsif. Ainsi en est-il du semeur Jésus. Il a distribué une centaine des grains avant d'obtenir un pourcentage de réussite.
Sa première tentative n'a pas été un succès. Il n'avait pas analysé la qualité du sol plutôt rébarbatif ni le ravage des insectes. Sa seconde tentative donne de maigres résultats, mais le peu de pluie affecte la qualité et la durabilité de la récolte. Sa troisième tentative ouvre une perspective plus encourageante, mais il lui manque des meilleures connaissances et analyses du sol. La quatrième tentative lui fait comprendre qu'un bon résultat exige à la fois une combinaison d'irrigation adéquate, d'ensoleillement constant et d'une terre préalablement labourée. De ces tentatives, il comprend qu'ensemencer exige des heures incontournables de patience et de confiance en son travail de préparation du terrain.
Jésus, nous le soupçonnons, n'est pas un agriculteur de métier. Il n'a pas travaillé au champ. Il ne parle donc pas en connaissance de cause. Il se soucie peu d'expliquer la raison du succès ou de l'échec de l'ensemencement. Comme tout chercheur, il s'autorise plusieurs tentatives d'ensemencement tout en espérant réussir.
Par cette parabole, Jésus veut encourager tous les chercheurs de foi à accepter des essais non satisfaisants, des erreurs de parcours décevants. Le message est limpide. Il ne suffit pas de dire «Dieu» , de dire «Salut», de prononcer le mot «Royaume» ou «Résurrection», pour ensemencer des germes de foi dans les coeurs. Un tel regard sur cette parabole porte à réfléchir en ces temps où la chrétienté s'éloigne de nous à grands pas.
Tout projet de foi commence par des essais, des progrès et des reculs. Tout ensemencement doit éviter de se renfermer dans les structures qui nous donnent une fausse protection, dans les normes qui nous transforment en juges implacables, dans les habitudes où nous nous sentons tranquilles, alors que, dehors, il y a une multitude affamée (EG 49).
Question : ne faut-il pas recommencer à ensemencer le nom de «Dieu», à dire la «résurrection», non avec une solide nourriture (1 Co 3, 3), non comme à des êtres spirituels, dit Paul en s'adressant aux corinthiens, mais avec des mots qui rejoignent des êtres faibles ?
Beaucoup d'essais seront des échecs appréhendés, mais nous dit la parabole, c'est la condition essentielle de toute réussite. De l'évangélisation. Ne disons pas qu’aujourd’hui c’est plus difficile que pour les premiers chrétiens. C'est seulement différent. AMEN.