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Année C : samedi de la 7e semaine pascale (litcp07s.17)
Jn 15, 9-17 : sommes-nous des «colocs» de Jésus?

En ouvrant son évangile, Jean et André posent une question à Jésus : Maître, où demeures-tu? (Jn 1, 38). Jean voulait savoir concrètement comment faire pour être proche de lui, pour rester avec lui, habiter, demeurer avec Lui. Sa demande était très terre à terre.  Jean aimait regarder Jésus. Il désirait demeurer avec Jésus.

Pour Jean, demeurer avec Jésus était tellement sa priorité que le mot revient plus de 32 fois dans son évangile. Ce mot dit tout son itinéraire spirituel. Il aimait demeurer proche de Jésus, rester longtemps en sa présence, de le regarder. Jésus a tellement apprécié son attitude qu'il en a fait son disciple bien-aimé.

Il y a la question de Jean. Il nous faut aussi écouter la réponse de Jésus : venez et vous verrez. Jésus donne de l’importance à la demande de Jean, ce que confirme le passage que nous venons d'entendre. Il faut voir, savoir voir que ce désir d'être proche de Jésus, d'être un «chambreur», un colocataire de Jésus, de mener une vie de proximité physique avec Jésus, ouvre sur un engagement de Jésus à demeurer près de lui, à maintenir une proximité permanente avec lui. Quelqu'un qui aime Jésus, qui demeure près de lui, qui se couche sur sa poitrine, Jésus l'assure en retour qu'il demeure en lui.

De là les nombreux appels de Jésus  : Demeurez en moi (Jn 15, 4-7), demeurez dans mon cœur. Demeurez dans mon amour (Jn 15, 9-10). De là provient la promesse eucharistique de Jésus :  celui qui mange ma chair et boit mon sang, celui-là demeure en moi et moi en lui  (Jn 6, 56). Jean découvrit ce jour-là – et pour toujours – où est la véritable demeure de Jésus. C'est celle qu’il révélait aux siens au moment de leur retirer sa présence quand il leur disait :  demeurez en moi, demeurez dans mon amour. L'allégorie de la vigne vient comme condenser tous les appels de Jésus (Jn 15, 1-17) : Celui qui demeure en moi et moi en lui, celui-là porte beaucoup de fruits. 

Demeurer, habiter, rester, des mots qui invitent à tenir bon, à ne pas changer d'adresse. Attention, demeurer avec le Christ ne signifie aucunement de s'isoler; il faut plutôt aller vers les autres. Sortir vers les autres. C'est la condition nécessaire pour porter du fruit (cf. Jn 15, 5) et, précisait le pape Benoît XVI aux prêtres de son diocèse (10 juin 2010), un moyen pour éviter que notre action apostolique ne se réduise à un activisme stérile.

Presque à toutes les pages de son évangile, Jean ne porte plus à terre tant il exulte de joie d'être avec Jésus. Et nous ? Exultons-nous de joie de demeurer dans la Parole de Jésus (Jn 8, 31; 1 Jn 2, 10), à garder sa Parole, celle qui oblige le Père à venir demeurer en nous ( Jn 14, 15-23) ou à vivre comme lui, celui qui prétend demeurer en moi doit se conduire à son tour comme moi ( 1 Jn 2, 6) ? Vous en conviendrez, cette proximité avec Jésus, cette  cohabitation avec Lui n'est jamais parfaitement atteinte. La qualité d'un fils est de demeurer dans la maison du Père. Mais s'agite aussi en nous le désir du fils cadet d'aller demeurer ailleurs.

Demeurez en moi.  C'est un ordre que Jésus nous donne. Cela veut dire: priez en moi, adorez en moi, aimez en moi, souffrez en moi, travaillez, agissez en moi. Demeurez en moi. Pour nous y aider, Jésus en précise le chemin, demeurer dans mon amour. C'est en pénétrant toujours plus avant en cette profondeur que nous l'annonçons.  Ne nous arrêtons pas à la surface des mots. Avec Paul, disons : je poursuis ma course (Ph 3, 12). Nous devons descendre chaque jour en ce sentier de l'abîme qui est Dieu.

C'est là, tout au fond, que l'abîme de notre néant, de notre misère, se trouvera en tête à tête avec l'abîme de la miséricorde, de l'immensité du tout de Dieu. C'est là que nous trouverons la force de mourir à nous-mêmes et que nous serons changés en amour.

Où demeures-tu ? Et Jésus nous conduit à devenir l'image de Dieu que nous sommes en habitant son coeur. AMEN.