2015-B-Lc 21, 19-33- vendredi 34e semaine ordinaire - regarder le monde en sauvé....
Année B : Vendredi 34e semaine ordinaire (litbo34v.15)
Luc 21, 19-33 : regarder le monde en sauvé....
Cela fait trois millénaires qu'on ne le voit plus ce Jésus… Qu'on ne l'attend plus non plus. On ne l'attend plus parce qu'on ne sait pas au juste quoi attendre. Qui attendre. On ne sait plus restez éveillés dans la prière (cf. Lc 21, 35).
L'histoire du figuier nous invite à demeurer en état d'éveil pour voir se réaliser une autre vision du temps non alimentée par cette peur viscérale de nos bavardages sur ce comment finira ce temps. Plutôt que d'entretenir la peur de l'avenir, l'image du figuier, de ses feuilles à saveur tendres qui annoncent que l'été est proche, évoque une marche vers un meilleur déjà présent. Cet avenir n'est pas clairement perceptible. On l'observe comme dans un miroir, dira Paul (1 Co 13,12). Le figuier, c'est Jésus qui nous invite à percer le smog entourant nos vies et à regarder pour savoir que l'été est proche. Quelle belle invitation ! Quelle belle vocation que de scruter l'avenir !
Dans la scène du figuier, Jésus ouvre à nos regards un genre de vie totalement nouveau. Une vie qui porte de beaux fruits. Des fruits de louange. Vous, montagnes et collines, plantes de la terre, océans et rivières bénissez le Seigneur. Ce cantique de Daniel fait surgir une belle photographie d'un avenir nouveau genre pour l'humanité. La bonne nouvelle derrière cette image du figuier, c'est Pâques. Le figuier, c'est l'autre mot pour dire Pâques. Le figuier, si c'étaient trois millénaires de lumière qui brillent au milieu du smog déprimant de notre aujourd'hui !
Le défi aujourd'hui est de transformer nos regards malades en regards de sauvés jusqu'à voir venir un Fils d'homme (cf. Dn 7, 13). Le défi est de scruter l'horizon, de l'observer attentivement pour éviter à nos regards l'accoutumance à voir tout en noir avec comme conséquence l'anesthésie du cœur (Pape François). L'anesthésie de nos mémoires aussi. Le regard de Jésus sur le figuier n'accepte pas la logique du noir. Voyiez le figuier et tous les autres arbres.
Dans le document Scrutate qui vous a été adressé pour célébrer l'année de la vie consacrée, les auteurs pour éviter cette logique du noir suggèrent d'entrer dans le symbole de la nuée qui guidait mystérieusement le che-min du peuple (# 2). Sans le dire expressément, ils parlent de l'obligation à la vigilance, de rester éveillés, mais aussi de l'obligation d'être des prophètes de la vigilance, de réveiller le monde.
Obligation à la vigilance parce que notre regard connaît des passages lumineux et des tunnels obscurs, des hori-zons ouverts et des sentiers tortueux (#2). Sans cette vigilance, nos regards risquent de devenir nonchalants dans la foi (cf. He 6, 12). Nous risquons de ne voir l'avenir qu'en terme de nombre et de ne plus entrevoir le vin en lequel l'eau peut être transformée (cf. Évangile de la joie, # 84).
En 1969, un jeune théologien du nom de Joseph Ratzinger se demandait si notre siècle n'est pas en train de se transformer en un gigantesque samedi saint, ce jour où Dieu est absent, où un vide glacial se glisse dans le cœur des disciples au point qu'ils s'en retournent chez eux vers Emmaüs ? Nous affrontons aujourd'hui cette réalité que décrivait ce jeune théologien, mais nous scrutons moins l'imprévisible arrivée du petit nuage de l'été dont parle le document Scrutate (# 10), que par grâce, Dieu nous offre à voir après les douleurs de l'enfantement.
Que ce soit dans l'image du figuier ou dans celle de la nuée, une question surgit : que faire pour maintenir notre regard en mode «lumière», en mode ressuscité jusqu'à savourer que l'été est proche ? Restez éveillés, dira l'évangile de demain. Ne perdons pas ce regard de foi qui nous mobilise à scruter les petits signes, les petits bourgeons. Ne perdez jamais [cette capacité] de scruter les petits signes. La bonne nouvelle réside dans le miracle des petits gestes, des petits bourgeons cachent la beauté de ce jour qui vient. C’est le chemin choisi par Jésus. Ne l'apercevons-nous pas ?
À votre contemplation : que la fraicheur de Pâques, ce temps nouveau, qui se voit dans le figuier autant que dans l'appel à scruter attentivement cet été de Dieu, ne gâte pas nos regards. N'anesthésie pas notre foi. Mes paroles ne passeront pas. AMEN.