2015-B-Jn 6, 1-15- dimanche 17e semaine- pas seulement de pain
Année B: Dimanche 17e semaine ordinaire (litbo17d.15)
Jean 6, 1-15 : pas seulement de pain
Le moins qu'on puisse dire c'est que Jésus n'a pas gaspillé le peu de pain qu'il avait. Ramassez les morceaux qui restent. Dans le langage d'aujourd'hui, c'est de la récupération. Ramassez. Jésus aurait-il inventé le verbe économiser ? Le livre de la Genèse s'ouvre sur une mission confiée aux humains : allez prendre soin de la terre, cultivez-la, protégez-la. S'agit-il d'un appel subtil au développement durable ?
Ne réduisons pas notre compréhension de cette page de la multiplication des pains et de son appel à ramasser ce qui reste à la seule faim de nourriture. Nous connaissons tous l'adage célébrissime bien connu de Jésus : l'homme ne vit pas seulement de pain (Lc 4, 1-13). Cet adage ouvre sur un jardin à garder. Un jardin communautaire qui ne doit pas être ni gaspillé, ni pillé ou détruit et qui appelle à une solidarité mondiale.
Dieu a donné à l'être humain la tâche de cultiver, de garder ce jardin dans lequel il l'a placé (Encyclique Loué sois-tu). Si l'on veut que ce jardin-terre puisse donner à manger à plus de dix milliards de personnes d'ici quarante ans alors que nous étions sept milliards en 2010, il faut de verts pâturages abondants d'un humus qui favorise la croissance.
Nous ne vivons pas seulement de pain. Nous vivons aussi du pain de la paix, de la liberté d'expression, de beauté. De la beauté de la nature qui souffre d'une démangeaison du progrès et de la productivité. De la beauté qui fait vivre, qui nous énergise. Qui donne de l'humus à nos vies. Toute personne qui ne protège pas cette beauté, qui détruit comme on l'a vu des villes immémoriales, détruit l'œuvre de la Création, née de l'Amour de Dieu pour nous.
Pain de Beauté : Dieu, le Créateur, nous a donné une maison commune à construire qui est comme une sœur, avec laquelle nous partageons l’existence, et comme une mère, belle, qui nous accueille à bras ouverts (#1) [mais] qui tombe en ruine, qui se transforme en un immense dépotoir, pour citer l'encyclique du pape François, Loué sois-tu. Dieu a placé l'être humain dans une terre voluptueuse, aux fruits succulents, aux arômes suaves. Pour préserver cette beauté très fragile qu'est l'environnement, le Pape appelle les pays riches, responsables de cette situation, à une décroissance de leur ambition économique, à une conversion écologique.
Nous ne vivons pas seulement de pain. Du pain de cette petite hostie pour manger le Tout. Nous vivons aussi du pain de sa Parole. Ce pain là, pain de l'Écriture, est accessible à tous les humains en tout temps et peu importe le lieu où ils se trouvent. Les lectures entendues nous présentent un Jésus qui nourrit une foule dans le désert. Jésus a aussi répondu à d'autres faims.
Il voit que le lépreux avait faim d'être intégré socialement (Mc 1, 40-45). Il devine chez la femme en perte de sang, sa faim d'être aimée que lui interdit sa situation chronique (Mt 9, 20-21). Il entend dans la demande ma-térielle des mendiants, une autre faim plus fondamentale, celle de se voir reconnus par la société (Mc 10, 46-52).
Ma question: la Parole de Dieu, ce sacrement que l'on entend, dit saint Augustin, ce vrai corps et vrai sang de Jésus (Origène, Jérôme), véritable présence réelle, la lisons-nous chaque jour ? Est-elle pour nous une vraie nourriture ? Ce livre n'est pas comme un roman. Il est à ruminer. Prends ce livre et mange-le […] puis va parler à la maison d'Israël (Ez 2, 8). Nous lisons non pas pour apprendre des choses sur Jésus, mais pour trouver Jésus. Nous ferions bien de nous demander pendant la journée, comment nous recevons chacun la Parole de Dieu. Tellement important que le Pape a fait distribuer à plusieurs reprises des petites bibles à la foule pour qu'il la porte sur eux.
Ramassez le peu qu'il reste. Ce peu de foi qui nous reste, c'est en écoutant et lisant la Parole de Dieu, que nous l'entretenons, la nourrissons. Mais ce peu de foi grandit en nous aussi quand on la donne. La foi sera toujours annonciation et visitation. Donnons à manger de notre peu de foi et, dit la première lecture, il en restera tou-jours. AMEN.