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Année B: Samedi 1ère semaine carême (litbc01s.15)

 Matthieu 5, 43-48 : la logique de la victoire

Nous avons besoin aujourd'hui de voir des chemins de victoire sur la haine, d'entendre une autre logique que celle de la foi devenue arme de guerre, de vengeance, de l'exclusion. Au plus profond de nous-mêmes, nous sommes non pas des tueurs de l'autre mais frères. Qu'as-tu fait de ton frère ?

Cette voix de Dieu n'en est pas une de condamnation mais un appel, chacun à sa place, à vivre cette grande aventure humaine d'être au-delà de toutes frontières, nations, races, religions, cultures, de la même race humaine. Tous frères.  Se venger n'est pas chrétien. Ce n'est même pas humain.

Cette page n'est ni une plaisanterie, ni une morale à vivre, ni une simple condamnation d'actes terroristes comme nous l'entendons aujourd'hui. Elle nous fait entrer, et c'est le sens du carême, dans une autre logique, celle de la victoire de l'amour sur la haine. Jésus, sur la montagne des Béatitudes,  réécrit dans une sorte de mise à jour, la loi proclamée sur le mont Sinaï (cf. Pape François, 18 juin 2013). Il nous fait ainsi entrer dans son mystère.  

En conclusion de sa description de la loi nouvelle, Jésus dessine au grand jour, l'implacable logique de l'évangile, celle de la victoire. Il nous fait voir en sa personne, que cette logique n'est plus celle de la destruction, mais celle du don dont la croix est la victoire absolue de l'amour et du pardon.

Toute sa vie, Jésus, et d'autres aussi comme Mahomet, Bouddha, nous a montré en sa personne, que cette nouvelle logique est réalisable. Possible. La manière de vivre de Jésus est une victoire sur le mal, un refus catégorique de la haine, de l'exclusion. Jésus a touché ses ennemis, a pris le temps de s'asseoir à leur table, pour les contaminer par une autre logique que celle de la tuerie entre nous.

Il y a au-dedans de nous, écrit Thérèse d'Avila (Chemin de perfection, #28), une autre chose plus précieuse, sans comparaison, que celle que nous voyons au-dehors. Nous sommes habités par une loi nouvelle. Ignace d'Antioche a demandé dans sa lettre aux Éphésiens, que votre exemple soit la voie [de cette logique]. À leur colère, opposez votre douceur ; à leur arrogance, votre humilité, à leurs blasphèmes votre prières, à leur erreur la fermeté de votre foi, à la violence votre sérénité, sans chercher à ne rien faire comme eux. Il termine sa lettre par un appel : essayons d'imiter le Seigneur (1 Th 1, 6) [pour que] l'on ne trouve pas, parmi vous, l'herbe du diable (Cf. Mt 13, 25).

Il ne suffit pas d'écouter ce passage. Il ne suffit pas aujourd'hui de professer la foi. Il nous faut montrer de quelle force nous sommes habités. Cette force, nous l'avons vu dans le martyr des 21 égyptiens coptes égorgés pour le seul motif d'être chrétiens et qui au moment de leur mort s'écrièrent : Jésus, aide-moi.

La logique de la victoire appelle à prôner non la violence, mais à proposer l'harmonisation de nos différences.   Cela est difficile. C'est même être un peu sot (pape François) parce que c'est renoncer à la logique mondaine. Question: comment peut-on aimer ceux qui décident de tuer ? François répond avec sa simplicité : je l'ignore, mais c'est la route parcourue par Jésus.  Devant ce déluge d'entrepreneurs de mort (pape François), devant ce constat que plus de 90% des nouvelles portent sur des gestes de destruction de l'humain, cette page appelle à nous appuyer sur le roc de la foi. Pas évident.

Mais quand nous considérons que nous voulons que les autres nous aiment malgré nos failles, que nous sommes aussi des ennemis pour les autres, alors, dit l'évangéliste Luc, faites aux autres ce que vous aimeriez qu'on vous fasse (cf. Lc 6, 31).  Si vous aimez ceux qui vous aiment, quelle récompense aurez-vous ?

Contemplons ces paroles de la première lecture : aujourd'hui le Seigneur ton Dieu te commande de mettre en pratique ces commandements  parce que, précise saint Silouane,  si tu n'aimes pas tes ennemis, tu ne peux connaître l'Esprit de Dieu. AMEN.