2014-B-Mt 21, 28-32-mardi 3e semaine avent-être ce que l'on est
Année B: Mardi 3e semaine de l'Avent (litbo3m.14)
Matthieu 21, 28-32 : être ce que l'on est
Que pensez-vous de ceci? Quelle délicatesse de la part de Jésus ! Une interrogation qui ouvre sur une prise de conscience de la manière dont nous vivons. Un homme avait deux fils. Avait deux cœurs. Un cœur qui dit et se contredit. Paul disait d'expérience : Je fais ce que je ne veux pas faire et ce que je veux faire, je ne le fais pas (Rm 7, 19). Le psalmiste demandait la guérison de son cœur : Donne-moi un cœur intègre… unifie mon cœur (Ps 85, 11).
Nos vies sont blessées par des divisions internes profondes. Mais la finale de l'évangile nous rassure, dans cette prise de conscience, qu'il y a un peu de nous dans cette parabole. Elle offre un chemin d'unification de nos cœurs déchirés, celui de se reprendre. L'évangile appelle cela : se repentir. Ne jamais s’arrêter d’aller de commencements en commencements par des commencements qui n’ont jamais de fin (saint Grégoire de Nysse), est le seul chemin qui nous fait être ce que l'on est.
Jésus n'était pas un grand parleur et un petit faiseur. Il n'était que Oui à son Père, quoiqu'il lui arrive. Quelque soit le chemin. Si tu le veux, Père, moi aussi je le veux. Jésus avait une horreur instinctive de tout ce qui est faux. Sonnait faux. Il avait une belle devise : être ce que l'on est. Son authenticité et son malaise profond devant ce qui sonne faux explique son commentaire aux scribes de son temps : ils disent et ne font pas (Mt 23, 3).
Aucun doute, Jésus privilégie l'action. Il recommande de ne pas en rester aux paroles, fussent-elles des paroles solennelles, des engagements par vœux. Pour lui, la manière de vivre est plus importante qu'une simple déclaration ou engagement. Pour lui, seul l'évangile vécu est éloquent. Il ne suffit pas d’annoncer l’évangile. Il ne suffit pas d’expliciter que nous sommes chrétiens, croyants, catholiques. Il faut être ce que l'on est. Il faut parvenir à faire évangile.
Sachons que pour Jésus, aucune fatalité n'existe. Pour lui, il n'y a pas de destin tracé une fois pour toute. Pensons à Zachée, à Mathieu, à Marie Madeleine ou à la femme de Samarie. Leur NON semblait définitif. Une rencontre au hasard de la route a transformé leur «non» en un «oui» jaillissant de leur cœur. Ils ont lavé leur vie dans le sang de l'Agneau.
Pour nous en convaincre, l'évangile de ce jour nous présente des situations extrêmes de repentir : les publicains [et] les prostituées [qui] vous précèdent dans le Royaume. Seul l’évangéliste Matthieu rapporte cette phrase difficile à inventer, ce qui fait dire à Gérard Bessière (L'enfant hérétique, Albin Michel, 2004): Apparemment, les trois autres évangélistes ont préféré la laisser dans l’encrier.
Pour Jésus, personne n'est irrécupérable. Le pape François nous le redit sans cesse par des paroles très fortes : la compassion change le monde en le rendant moins froid et plus juste (première angélus du pape). À Rio devant les évêques, il a dénoncé des pastorales qui privilégient les principes […] sans proximité, sans tendresse, sans caresse.
En terminant une question à contempler : un jour nous avons dit OUI, comme Marie, comme Joseph, comme Jésus. Ce OUI était baptismal, conjugal, professionnel. Où en sommes-nous dans nos «faire» après tous ces «dires» nous demande Jésus ce matin ?
Que Marie, qui n'a jamais repris son oui, même au pied de la croix de son Fils, et en qui, nous dit saint Paul, il n'y a eu que le oui au Père, nous apprenne à dire nos petits oui de chaque jour, nous laissant, comme elle, façonner par l'Esprit de son Fils qui a fait de nous une créature nouvelle dans ton Fils. AMEN.