2012-B- Jn 20, 11-18 -Mardi octave Pâques - apparition de Jésus à Marie madeleine
Année B: Mardi octave de Pâques (litbp00m.12)
Jn 20, 11-18 : apparition de Jésus à Marie madeleine
Comme vient de l'écrire Roger Lenaers, même si pour l’homme occidental du troisième millénaire le langage de la tradition chrétienne est devenu une langue étrangère, un autre christianisme est possible (Éd. Golias, 2011); c'est le titre de son livre. Pour cela, il nous faut passer au crible tout le langage, les gestes, les symboles, les manières de comprendre ce que nous avons reçu du passé. Notre langage pour dire notre foi, est d'une autre époque, d'un autre monde, mais il cache un trésor à découvrir.
Ce que les premières générations chrétiennes ont vécu au contact de Jésus de Nazareth, ce que les rares témoins de Pâques ont conservé et ont fait connaître de leur rencontre avec le Ressuscité, continue à nous concerner, à nous interpeller.
Il nous faut retrouver dans notre vécu personnel la richesse que Jésus a éveillée dans ces témoins dont Marie-Madeleine (évangile) pour que notre prise de parole soit aujourd'hui compréhensible. Que peut signifier Pâques autour de nous si nous ne manifestons pas que nous sommes des «vivants» ? Que veut dire Ressuscité d'entre les morts si nous ne sommes pas des «transfigurés» par notre rencontre avec le Ressuscité ? Comment affirmer que nous sommes dans le paradis de Dieu quand notre terre semble plutôt n'être qu'une terre d'engendrement de conflits, de luttes fraternelles, de haines ? Que clame notre Alléluia si nous ne sommes pas des créatures nouvelles vivants des temps nouveaux (2 Co 5, 16) etoffrant une parole neuve ? Si nous ne sommes pas des fils de Dieu chantant notre Alléluia de retrouver le Père ?
En ouvrant son livre sur un autre christianisme possible, l'auteur conseille de ne pas en entreprendre la lecture si la nouveauté ne nous concerne pas. Nous n'avons pas le droit de parler de Pâques si la nouveauté ne nous concerne pas.
Pâques, c'est voir et faire voir par nos vies que quelque chose qui est arrivé à Dieu en Jésus (Joseph Moingt),quelque chose qui est inexprimable, indéfinissable, difficile à sonder (Origène) parce qu'il dépasse nos mots humains. Pâques, c'est quelque chose comme un grand matin (Mt 28, 1)qui confirme que la nuit est engloutie dans la victoire du soleil levant. Quelque chose qui nous réchauffe : notre cœur n'était-il pas tout brûlant au dedans de nous (Lc 23, 32)?Quelque chose qui nous fortifie aussi : sur l'heure, ils partirent et revinrent à Jérusalem (Lc 24, 33).
Ce quelque chose, dit Maxime le Confesseur, c'est que le matin de Pâques, pour Dieu, c'est [l'] allégresse de voir que la raison d'être du monde est enfin apparue dans le Christ ressuscité. Ce quelque chose nous fait voir pourquoi Dieu a créé le monde qu'il n'avait pas besoin pour être heureux. Pâques, c'est Dieu qui désire simplement nous faire partager sa gloire.
Mais comment exprimer ce quelque chose une fois dépassée l'expérience du manque éprouvée d'abord par Marie-Madeleine et les témoins du tombeau vide? Pour traduire en des mots humains, leur expérience pascale, Pierre déclare simplement : Celui que vous avez livré, Dieu l'a ressuscité (Ac 2, 23-24). L'évangéliste Matthieu affirme que c'est là l'œuvre de Seigneur, quelle merveille à nos yeux (Mt 21, 33-34). Paul, lui, utilise un langage de folie, celui de la croix qui est l'autre face de ce grand dimanche.
Et nous aujourd'hui, c'est le langage d'inviter à réussir l'humain à la mode de Dieu. Être chrétien n'est pas autre chose qu'être pleinement humain (Moingt, J. ; Burdelot, Y). Dire Pâques, c'est sortir de nos sacristies (Jean-Paul II) pour nous tourner les uns vers les autres parce qu'il n'y a plus ni juif ni grec, ni homme libre ou esclave, ni masculin et féminin, car tous vous n'êtes qu'un en Jésus-Christ (Ga 3, 28). C'est devenir collectivement responsable du ministère de la réconciliation (2 Co 5, 18) dont parle Paul. Responsable d'une terre neuve et pourquoi pas d'une institution neuve.
Une eucharistie pascale pour devenir ce que nous contemplons et pour contempler ce que nous sommes. AMEN. ALLÉLUIA.