2005-A : Dimanche 19e semaine ordinaire -Mtt14, 22-33 une barque fragile
Année A : Dimanche de la 19IÈME SEMAINE ORDINAIRE (litao19d.05)
Matthieu 14, 22-33 une barque fragile
Deux images fortes nous sont données à voir ce matin : celle d’une mer agitée – notre monde et sa toute puissance et celle d’une petite barque – notre Église et sa grande vulnérabilité. Entre ces deux images, un « fantôme » mieux une « épiphanie » de Quelqu’un qui surmonte les forces du chaos et qui permet ainsi à la fragile barque une fin de traversée calme et paisible.
La 1ière lecture offrait une autre image semblable, celle de l’ouragan si fort qu’il fendait les montagnes et celle du murmure d’une brise légère. Avez-vous compris toute la profondeur de sens qu’il y a dans ces deux passages bibliques ?
Dans ces deux images fortes, nous retrouvons tout ce que nous vivons comme Église présentement. Image de puissance. Trop longtemps comme Église nous avons pu éprouver que nous étions dans un Titanic inattaquable. Ce Titanic a rencontré un défi plus puissant que lui. Mais avant de sombrer, les naufragés n’emportant rien de leurs richesses matérielles, sautèrent dans des barques fragiles sur la mer agitée. Ils ramèrent ainsi vers le rivage.
Jésus fait mimer à ses disciples ce qu’ils sont. Ils sont là sur le lac: dans une pauvre barque, figure de ce petit troupeau à qui le Père confie le sort de son Règne (cf. Lc 12,32). Ailleurs Jésus avait fait mimer une autre scène semblable. Il était là dormant sur une mer agitée alors que ses disciples apeurés le réveillèrent. (Mtt8, 23-27)
L'Église ne sera jamais semblable à un transatlantique pour croisière de vacances. Elle ne sera pas non plus semblable au sous-marin qui met ses passagers à l'abri des courants marins, comme une sorte de ghetto préservant des tentations et des épreuves.
Ce que Matthieu nous dit : c’est que la toute puissance des vagues ne peut rien contre la toute-puissance de la fragilité. Ce qui est fragile ne casse pas. Ce qui est puissant se brise. Songeons à la fable du chêne qui s’est déraciné dans la tempête et du roseau qui a simplement plié la tête pour se relever après.
Il faut changer de vision. Reconnaître nos manques de moyen jusqu’à les confesser conduit à la réussite apostolique. Grégoire de Nysse disait que l’abaissement de Dieu est le plus grande preuve de sa toute-puissance. Nos manques de ressource sont la plus grande preuve de la réussite à venir.
Cela fait souffrir. « Si l’inefficacité apparente de notre agir n’était pas pour nous une souffrance, cela serait un signe de notre manque de foi, de notre manque d’engagement. Nous devons avoir à cœur ces difficultés de notre temps et les transformer en souffrant avec le Christ et nous transformer ainsi nous-mêmes. » (Benoît XV1)
Chrétiens, n’ayons pas peur de nos fragilités. Elles sont la garantie de la réussite. Une poignée de disciples, de grain de sénevé, seulement cinq petits pains et deux poissons (dimanche dernier) dans l’immensité de l’ivraie font toute la différence. N’ayons pas peur de marcher avec foi sur la mer vers Jésus. « Sans la foi, nous ne pourrons pas survivre. Sans la foi notre monde serait vide » (Élie Wiesel). En nous, cette foi est comme la marée. Tantôt elle monte jusqu’à nous avec force. Tantôt elle se retire, silencieuse et tranquille. Elle n’est pas un refuge pour les petites natures. Elle ne nous place pas à l’abri des défis de la mondialisation et de la toute-puissance.
A votre contemplation : Au milieu de ce grand bouleversement que connaît notre Église, redisons comme Pierre « vraiment tu es le Fils de Dieu ». Hier, c’est par sa « voix qu’il se fit reconnaître » (Jean Chrysostome). Aujourd’hui, c’est en entendant son appel à venir et marcher sur les eaux agitées que nous ferons avancés notre monde vers cette « Terre aux verts pâturages ».