2010-C-Mtt 6, 1-6, 16-18 Mercredi des Cendres- laissons-nous réconcilier.
Année C : Mercredi des Cendres
Mt 6, 1-6, 16-18 laissons-nous réconcilier.
ACCUEIL:
Il n’y a pas qu’un premier pas à faire. Toute notre vie est une histoire de premier pas. Voici le temps favorable (2 Cor6, 2). Voici le temps de laisser Dieu entrer dans notre cœur et d’y régner.
HOMÉLIE:
Je voudrais vous dire une chose, une seule chose, je voudrais la clamer, la crier pour qu’elle puisse enfin être entendue. Cette chose est simple, infiniment simple. Elle ne demande aucun diplôme pour être comprise, aucun effort pour être atteinte. Cette chose, nous la connaissons, nous l’avons enseignée. Il faut la redire sans réserve. Elle ramasse toute la foi chrétienne. Cette chose que je veux vous dire : Nous n’avons pas à mériter notre carême. L’unique désir de Dieu est d’entrer dans notre cœur et d’y régner (Jean-Nicholas Grou). Dieu Lui-même nous choisit tels que nous sommes. Rien, pas même une vie d’enfer, une vie de comportements antihumains, rien ne repousse Dieu. C’est nous qui le refusons.
La foi chrétienne nous dit saint Paul aux Romains, c’est de ne plus nous tourmenter par nos impuissances à devenir des saintetés, de ne plus angoisser par nos faiblesses, de ne plus désespérer d’être incapable de mener une vie parfaitement conforme à l’Évangile. La foi chrétienne, c’est Dieu, la fameux Tout-puissant, qui vient transformer nos démons en sainteté et faire comme dit Maurice Bellet de nos fautes une vieille peau morte qui tombe au lever du jour. Le carême ne sera jamais une série de mortification, d’ascèse à faire ou ne pas faire.
Entrer en carême est une entreprise redoutable, celle qu’ouvre le jeûne vécu non comme mortification mais comme libération de nous-mêmes. Celle de nous laisser réconcilier avec Dieu. Croire que rien ne peut nous séparer de cette insaisissable initiative de Dieu. Depuis les origines du monde, depuis le comportement d’Adam qui a refusé de recevoir gratuitement le paradis et sa beauté pour l’acquérir par ses propres moyens, Dieu ne cesse de prendre l’initiative de nous défaire de nos «moi» revendicateurs. Ma grâce te suffit (2 Cor 12, 9).
D’où nous vient cette idée que nous devons mériter Dieu, qu’il faut d’abord être digne de lui et qu’ensuite il pourra nous offrir son salut ? Elle vient de la priorité que nous donnons aux paroles de Dieu : Dieu n’a-t-il pas dit, tu ne mangeras pas. Jésusn’a-t-il pas dit : soyez parfaits comme notre Père est parfait, que votre justice dépasse celle des nos croyants ? Ce sont là des tentations piégées pour nous faire oublier que le cœur de l’Évangile, la perfection de l’Évangile est l’accueil d’un Dieu qui n’a pas besoin de nos bonnes œuvres pour nous sauver. Nous priorisons ces paroles pour mieux oublier que la perfection de l’Évangile est l’accueil d’un Dieu qui n’a pas besoin de nos bonnes actions pour nous sauver. Le cœur de l’Évangile : Dieu le premier vient nous réconcilier avec lui. Le sommet de notre carême n’est pas l’ascèse qui ne sera jamais première, ni même essentielle. C’est cette brulante tendresse de Dieu qui nous brûle tout entier, qui nous transforme en sainteté.
L’ascèse n’est pas une création chrétienne. Elle peut se vivre sans amour. Elle ne peut en rien nous mériter Dieu. Dieu ne se mérite pas. Il se reçoit. Nous connaissons cette vieille histoire : je te remercie Seigneur de ce que je ne suis pas comme les autres. Et au fond de l’église, un autre priait : pitié de moi qui suis pécheur (Lc 18, 9-14). Nous savons cela. Et pourtant…
Saintetés, en entrant dans ce carême, méfions-nous de la perfection du miroir. Méfions nous de cette mode tendance de notre culture de nous donner une image extérieure satisfaisante de soi pour nous justifier de n’être pas à l’intérieur ce que nous voulons être. Méfions-nous d’être des «saintetés» par nos propres efforts. Nous ne valons pas par nos œuvres. La «sainteté» est de nous savoir habités malgré nos tendances de «démones» par la grâce de Dieu. C’est de témoigner de Dieu malgré nos et avec nos errances. N’ayons pas la rage d’être parfait par nous-mêmes. D’être des saintetés par nous-mêmes.
Quand il est écrit : soyez parfaits comme votre Père céleste est parfait cela est à comprendre : soyez parfaits à accueillir Dieu, ce Dieu qui fait pleuvoir la pluie sur les bons et les méchants, lever son soleil sur les justes et les injustes (Mt 5,45). Quand il est écrit ne jugez pas et vous ne serez pas jugé cela risque de nous ouvrir un chemin tout neuf parce qu’il permet à l’autre le droit d’exister même avec ses imperfections, de ne pas voir la paille dans son œil (Lc6,41; Mt7,5). Prodigieux chemin. C’est celui de notre carême.
À votre contemplation : quarante jours pour n’être qu’accueil de Jésus qui vient nous offrir sa grâce afin que nous puissions, par pure grâce, accueillir son offre de nous sauver. Si nous trébuchons, si nous nous égarons, sachons que la seule vraie tentation, notre seul péché c’est le désespoir. Pour le reste, à chaque jour suffit sa peine. Le premier commandement, c’est l’accueil du don que Dieu nous fait. Inutile de tout faire reposer notre carême sur la loi de l’ascèse, de l’aumône ou de la prière – ce sont là des astuces facilitant -
Faisons nôtres ces mots de François d’Assise qui devant l’empressement de Dieu en Jésus à venir vers nous, son désir de n’être qu’amour qui frappe à notre porte, a chanté par deux fois (Billet à Frère Léon) : tu es beauté et mansuétude. Ne nous détournons pas de cette beauté. Convertissez-vous et croyez en l’Évangile. Voilà ce que nous devons entendre. AMEN