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Année B : Lundi 10e semaine ordinaire (litbo10L.09)
Mtt 05,1-12  Devenons humains : les béatitudes 
 
  Ce matin, une autre folie : de vivre heureux, de vivre en état de béatitude. À la folie de la désappropriation – c’était ça qui a fait le malheur des vignerons – Jésus ajoute une autre folie : nous réaliser pleinement en devenant humain.  Quand Jésus prononça les béatitudes, il  était conscient qu’il s’adressait à une foule pour qui le bonheur – c’était ça le message de l’Ancien testament – résidait dans la richesse, le pouvoir,  l’accomplissement de la loi,  d’avoir plusieurs femmes.  Même les disciples – nous l’avons entendu dans la lecture de l’Ascension- envisageaient que le bonheur verrait le jour quand Jésus allait rétablir cette royauté de puissance.

Or, nouvelle folie, Jésus ouvre pour l’humanité un « autre » chemin de bonheur. Il ne consiste plus dans le pouvoir, la possession mais dans l’accomplissement de l’humain. Paradoxe, malgré des records de consommation, de toujours plus grand, autour de nous se cache un «mal d’être». Comment comprendre que la prospérité s’accompagne de déprime? Où est l’erreur ?  Il y a erreur – et c’est toute la beauté de ce que Jésus enseigne à la foule parce qu’elle existait à l’époque de Jésus - sur la conception du bonheur.   Le bonheur ne se trouve pas dans l’avoir mais dans une qualité d’être : être  doux, compatissant, pacifique,  juste.

Il faut réentendre cet appel inouï.  Pour plusieurs, ce sont là des attitudes de faiblesse. Cette page est la morale des faibles disait Nietzche.   Ce devenir béatitude est impossible sans ce dialogue avec ce Plus qui est en nous (Zundel). Il s’empressait d’ajouter : il y a trop d’hommes et de femmes mais l’humain (l’homme)- l’humain des béatitudes qui est un renversement de valeur sur l’ancien testament - n’est pas encore né. 

Devenir pleinement humain est une tâche que nous ignorons. Désirer toujours plus de pouvoir, d’être toujours plus mondialisé- ce dont nous rêvons-  est un fantasme aliénant l’humain  dit le dominicain COUREAU dans une excellente étude entre le christianisme et le bouddhisme. Il ajoutait nous nous engluons dans le jeu des passions de l’argent, du sexe, du stress etc. Quelque chose en nous, nous fait ressembler à l’homme riche de l’Évangile qui amasse des biens, refait ses greniers. Il n’était pas une mauvaise personne. Il recherchait seulement sa sécurité. Il reportait à plus tard le souci d’être pleinement humain.

L’Évangile du bonheur a quelque chose d’inaugural. Il inaugure un chemin de sainteté. D’accomplissement. De plénitude d’être. Ce qu’annonce cette page, ce qu’elle opère en nous, c’est une naissance d’humanité. Voici l’homme. Sur la montagne, Jésus nous offre à voir que le chemin du bonheur est de devenir ce que nous sommes.  Il a pris ce chemin. Il nous l’offre. 

Ce dont nous avons le plus besoin, c’est de bonté, de compassion, de justice, de paix. L’Apôtre écrivait aux Colossiens : Vous donc, les élus de Dieu, ses saints et ses bien-aimés, revêtez des sentiments de tendre compassion, de bienveillance, d’humilité, de douceur, de patience ; supportez-vous les uns les autres et pardonnez-vous mutuellement, si l’un a contre l’autre quelque sujet de plainte ; le Seigneur vous a pardonné, faites de même à votre tour  (Col 3, 12-13). Voilà la nouvelle folie.  Cette folie-là, ce trésor là, nous la portons en des vases fragiles, d’argiles.
                             
  À votre contemplation, cette page atteste de la manière de se comporter de Jésus à notre endroit. Elle est un métier qui s’apprend.  Jésus fut humain, très humain, le plus parfait des humains. Jésus s’est dit à nous sur la montagne. Il nous a révélé le fond de son être. Ayons avec l’aide de l’Esprit de Dieu, l’audace de devenir ce que nous sommes.  Oui, comme l’exprime la 1re lecture, béni soit Dieu le Père de notre Seigneur Jésus, Père plein de tendresse qui nous réconforte, soutien pour que nous devenions et vivions comme Lui. Soyons des saintetés heureuses. AMEN