2012 - B : Vendredi 2e semaine ordinaire-Mc 3,13-19 : un «bonjour» de Jésus
Année B : vendredi 2e semaine ORDINAIRE (litbo02v.12)
Mc 3,13-19 : INVRAISEMBLABLE QUE CE «BONJOUR» DE JÉSUS !
Dans la lointaine antiquité, Descartes écrivait : une fois dans sa vie, il me fallait entreprendre sérieusement de me défaire de toutes les opinions que j'avais reçues... et commencer tout de nouveau. Devant cet appel des douze pour en saisir toute la portée, ne faut-il pas, nous aussi, entreprendre sérieusement de [nous] défaire de toutes nos imageries sur ce qu'est suivre Jésus. Suivre Jésus ne sera jamais ce que nous pouvons en penser.
C'est un appel pour le paradis, pour retrouver une manière paradisiaque de vivre. Ce n'est pas une vie de lutte permanente, de renoncement quotidien qui s'ouvre en réponse à cet appel, mais la joie qui dérange nos recherches de fêtes pour oublier nos malheurs. La vraie tentation n'est-elle pas de succomber à cette joie? Un jour du temps, nous avons mis le paradis à la porte mais cet appel nous fait retrouver le chemin du paradis.
Cet appel ne prolonge pas le vide et le néant où se trouvaient les élus-apôtres. Il n'est pas non plus pour eux pure illusion. Il enclenche, plus qu'il ne le dit, une longue marche vers une écoute de ce paradis qu'est Jésus jusqu'à faire de leurs vies d'appelés des portes de paradis pour les autres. Oui, entreprendre sérieusement de nous défaire de toutes nos imageries sur cette page pour, une fois dans notre vie, répondre sans résister, sans résistance, et marcher vers un ailleurs qui n'est ni fuite, ni évasion de notre monde, celui de vivre le paradis, de vivre en état de béatitude permanente au cœur du monde.
À qui entend cet appel, un mot surgit : émerveillement. Double émerveillement. Émerveillement de nous savoir aux yeux de Dieu désirables ; émerveillement de nous savoir mandatés pour voir Dieu en toutes choses (saint Ignace), jusqu'à prolonger le regard d'émerveillement de Jésus sur les siens. Émerveillement de nous savoir capables d'une compétence évangélique (André Fossion) à vivre et à promouvoir.
Pour Jésus, «appeler» était sa manière de dire « bonjour» à ceux qu'ils rencontraient. Rien de plus ordinaire que de saluer, que de dire «bonjour», mais ce «bonjour» ouvre sur une promesse. Il est plus qu'un geste de civilité; plus qu'un simple savoir vivre. Ce simple «bonjour» de la part de Jésus ouvre sur une vie neuve, une vie où le paradis n'est pas très loin. Un simple «bonjour» - simple comme bonjour - qui creuse en nous le vertige d'une vie paradisiaque, celle de voir Dieu en toutes choses. Pas possible, mais vrai.
Saintetés, quelle sainte révérence Jésus nous porte ! À quel abaissement il accepte de descendre pour nous lancer vers le sommet d'une vie béatitude ! Un mot ordinaire, une geste ordinaire de décorum de Jésus qui nous lance sur un «beau jour» inouï, qui nous fait entendre rien de moins qu'un « bon retour», en dépit de nos glissages malheureuses, vers des retrouvailles combien bienfaisantes avec nos origines. Un « bonjour» et nous redevenons ses amis.
Ce « bonjour» ouvrant l'évangile de Marc laisse entrevoir un autre «bon matin» celui où, portes closes, Jésus s'amène pour nous redire que la paix soit avec vous. Salutation qui est un «au revoir», pourquoi pas un «adieu» à une vie de ténèbres. Oui, une page d’émerveillement sans fond que cet appel, que ce «bonjour» divin qui résonne encore, qui fait long feu en nous, même si notre quotidien nous pousse spontanément à dire «bonnes ténèbres» parce que cette vie neuve qu'amène cet appel Jésus semble si peu séduire autour de nous.
Un «bonjour» qui nous fait faire un petit pas vers le pas possible d'une vie neuve, celle d'appelés à dégager en nous et autour de nous le «Shalom», le «bonjour» du matin de Pâque.
Une eucharistie pour qu'une fois dans notre vie, une seule fois (nous puissions) entreprendre sérieusement d'écouter ce « bonjour» de notre premier appel qui nous lance vers une aspiration sans fonds, celle de mener une vie eucharistique comme chemin pour, à notre tour, dire « bonjour» à notre monde. AMEN.