2010-C-Lc 17, 1-6-Lundi 32e semaine ordinaire - croire, c'est nous laisser former par Dieu, formateur de nos vies
Lundi de la trente-deuxième semaine du Temps ordinaire (litco32l.10)
Lc 17, 1-6 : croire, c'est nous laisser former par Dieu, formateur de nos vies
C'est un beau risque que de passer dans le camp de Dieu (Clément d'Alexandrie). Ce beau risque, les deux lectures viennent de nous en profiler le contour. C'est le risque de mener une vie sans dessus-dessous parce que, tous et toutes, sommes responsables d'Église. Une vie sans dessus-dessous, c'est mener une vie sans reproche, inattaquable, s'attacher à une parole sûre, donner un enseignement solide, ne pas entraîner l'autre au scandale, de pardonner sept fois par jour (première lecture). Devant une telle manière de vivre, si peu habituelle, les disciples demandèrent à Jésus: augmente en nous la foi.
Mais comment faire grandir ce peu de foi que nous avons déjà ? Au tout début de l'ère chrétienne, saint Irénée donnait cette réponse : si tu te livres à lui en lui donnant ta foi, tu recevras le bénéfice de son art [de créateur] et tu seras le parfait ouvrage de Dieu. Ce que nous dit saint Irénée, c'est que si nous laissons Jésus nous former, si nous écoutons les dires de Dieu, il burinera en nous, responsables d'Église, sa perfection. Nous devenons alors bassins - ce dont l'Église a le plus besoin disait saint Bernard- qui déversent abondamment sa miséricorde. Les disciples demandèrent à Jésus la grâce de se laisser buriner par Dieu, former par Dieu, parce que former,dit encore saint Irénée, est le propre de la bonté de Dieu et être formé est le propre de la nature de l'homme
Cette prière-demande des disciples ne se rapporte pas aux dogmes, à une vérité donnée. Elle doit plutôt être comprise comme le désir des disciples de voir renforcir en eux la certitude que Dieu leur fait tellement confiance qu'il confie à chacun un charisme que personne d'autre ne peut réaliser à leur place.
Cette demande-prière des disciples est la nôtre. Demander chaque jour (peut-être plus maintenant qu'hier parce notre âge nous rend plus irritable aux moindres contradictions) : augmente notre foi en ta Présence en nous qui nous fait accomplir ce qui dépasse notre nature humaine. Humainement parlant, c'est difficile d'aimer ceux qui nous font souffrir (oraison), de les faire entrer en nos cœurs jusqu'à leur pardonner sept fois par jour. Pour grandir, notre foi a besoin des autres qui sont, disait Camus, enfers tant ils nous mettent à l'épreuve de mener une vie sans dessus-dessous. Mais rien n'est dur à ceux qui aiment [comme Jésus],disait saint Jérôme.
Augmente en nous, burine en nous ta perfection. Pour dire cela, pour exprimer l'impossible faisable, l'évangile emploie des images comme celle du chameau qui ne peut passer par le trou d'une aiguille, celle d'une graine de moutarde (Lc17,6) qui nous fait transporter des montagnes. Je crois, Seigneur, mais viens au secours de mon incrédulité (Mc 9, 32).
Augmente en nous notre foi en cette capacité de vivre en forme de la perfection de Dieu. C'est beaucoup plus que de transporter des arbres ! C'est transplanter notre existence dans le cœur de Dieu. C'est permettre à notre vie enracinée dans la terre d'ici de prendre racine dans l'océan de la divinité. La demande-prière des disciples visait à avoir «plus». Jésus leur répond d'être cette graine de moutarde qui nous métamorphose en forme de Dieu. Elle nous permet de «supporter» l'épreuve de vivre de la perfection de Dieu. Elle est une manière de posséder ce qu'on espère (He 11, 1), de courir avec endurance l'épreuve qui nous est proposée (He 12, 1).
Saintetés, nous qui sommes héritiers de Dieu, cohéritiers du Christ (Évagre le Pontife), cette demande-prière des disciples est nôtre si nous voulons la transmettre autour de nous. Si notre foi s'affadit, se refroidit, perd de sa beauté en éparpillant nos pensées sur des futilités, en accordant de l'importance aux éphémères choses de ce monde, comment pourrons-nous la transmettre?
À votre contemplation : pour ce Dieu, formateur, qui a transformé nos vies à l'image de la sienne en y semant une graine de foi qui appelle à être soignée, nourrie, à grandir aussi, rendons grâce à Dieu. Elle nous fait capable d'écouter les dires de Dieu dont Paul vient de nous en présenter le profil qui doit briller dans tout responsable d'Église que nous sommes. Elle nous transforme en eucharistie pour le salut du mode. AMEN.