2012-B-Lc 17,11-19 - Lundi 27e semaine ordinaire- le lépreux guéri; action de grâce
Année B: Lundi 27e semaine ORDINAIRE (litbo27l.12)
Lc 17 11-19 : le lépreux guéri; action de grâce
Le Livre de la sagesse ne manque pas de sagesse quand il écrit que l'œil n'a jamais fini de voir (Ecc 1, 8). Il n'a jamais fini d'être dépoussiéré de tout ce qui n'est pas beauté. De tout ce qui n'ouvre pas à l'émerveillement et à l'action de grâce. L'Ecclésiaste poursuit en ajoutant : et à nos oreilles d'entendre le chant de la beauté.
Cette fête qui, pour plusieurs, ne signifie qu'un jour légal de congé, nous est donnée par l'État pour découvrir la Beauté de l'âme du monde (titre d'un livre récent de Frédéric Lenoir). Pour découvrir la beauté qui sauve le monde. Je sais aujourd'hui, dit le poète Arthur Rimbaud, saluer la beauté.
Dans un livre remarquable (Cinq méditations sur la beauté, éd. Albin Michel, 2006) l'académicien François Cheng écrivait que nous avons à faire face [aujourd'hui] à deux phénomènes extrêmes, des mystères dans le mystère, qui nous hantent et nous stupéfient : le mal et la beauté. Il ajoutait: le mal nous savons ce que c'est. La beauté demeure énigme. L'action de grâce est un état d'âme qui nous propulse dans ce que la thérapie brève nomme le «réenforcement» ou feedback positif. Elle est un don qui vient du regard.
Cette journée de l'action de grâce veut nous éviter de nous endormir jusqu'à ne plus voir ce monde, notre terre, comme un jardin plantureux alors que nous décrions avec tant de facilité cette même terre devenue convoitise pour les mondialistes. Cultiver notre émerveillement pour la beauté d'en-bas, sans oublier la beauté des beautés qu'est Dieu, précise Augustin (Conf. III, 6, 10). Pour le théologien Hans Urs von Balthasar, c'est sur la croix que le Christ atteint cette beauté des beautés parce qu'en elle, Jésus a rendu beaux ceux qui étaient haïssables. Magnificat !
Notre être chrétien, et en cela le lépreux retournant vers Jésus le confirme, n'ouvre pas d'autre droit que la joie, que la joie de nous tourner vers Dieu, de retourner vers Dieu, la joie de l'action de grâce, autrement dit, la joie de faire eucharistie pour les fruits de la terre et du travail des humains dont nous sommes comblés en abondance. Ô terre, ne crains plus! Danse et réjouis-toi...Car le Seigneur a répandu ses largesses... il vous a donné la pluie avec générosité... celle de l'automne et celle du printemps (1ière lecture -Joël 2, 21-24).
Heureux ce lépreux, samaritain de surcroît, qui ne voyait que l'auteur de sa guérison et non sa propre vigueur retrouvée. Heureux ce lépreux reconnaissant (dans les deux sens du terme !) qu'il n'avait rien qu'il n'ait reçu (1 Cor 4, 7). Il a sauvegardé ce qui lui avait été confié (2 Tm 1, 12).Il est revenu vers Jésus en rendant grâce. Il se disait, dans les mots du psalmiste : Qui donc est l’homme pour que tu t’en soucies, un fils d’homme pour que tu en prennes souci ? Que nous sommes misérables quand nous oublions combien est gratuit ce que nous avons reçu ! Quelle vie pitoyable nous menons quand nous aimons autre chose que le beau !
Saintetés, il nous faut faire attention à la manière dont nous voyons. À la manière dont nous cultivons l'émerveillement. Il nous faut sans cesse dépoussiérer nos regards remplis d'autres choses que de beauté et de reconnaissance. Sans cesse permettre à nos oreilles d'entendre autres choses que les bruits horrifiants de notre monde. Ne jamais cesser d'admirer l'harmonie, la beauté du monde et la bonté des humains. Ne jamais cesser, tel des enfants, de nous étonner, car l'étonnement conduit à découvrir l'invisible qui se cache sous les apparences extérieures. Cette fête est celle de la transcendance de nos regards. Une fête élévation qui nous sensibilise à découvrir du beau dans notre quotidien et d'en rendre grâce.
À votre contemplation : nous animer à pratiquer à voir qu'il y a dans les humains plus de choses à admirer que de choses a mépriser (Albert Camus), c'est très bon pour notre vie chrétienne. C'est essentiel aussi. Une journée, une vie pour prier le Seigneur d'ouvrir nos lèvres et d'en publier sa louange. Comme l'exprimait l'antienne d'ouverture, à tout moment et pour toutes choses, rendez grâce à Dieu le Père au nom de notre Seigneur Jésus. AMEN.