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Dix-neuvième dimanche du Temps ordinaire (litco19d.10)
Lc 12, 32-48

Dimanche dernier, une question pleine de sens nous était posée : dans quoi investissons-nous nos vies? Dans les réalités d’en bas ou dans celles d’en haut? Ce matin, Jésus appelle à une attitude plus fondamentale. Il nous entraîne à enraciner profondément nos vies sur un trésor impérissable.  Il ouvre nos  vies  sur une sécurité que ni la rouille ni les mites du temps ne pourront attaquer.  Jésus nous lance un appel qui exige beaucoup de maturité : lui faire confiance en mettant notre foi en lui. Qui pourrait dire à quelqu’un «je t’aime» et ajouter immédiatement « mais je ne te fais pas confiance».  C’est impossible; c’est impensable.  Aujourd’hui, devant tous ces criminels à cravate qui trahissent notre confiance, qui nous coûte très cher, nous fait très mal,  la question se pose : à qui pouvons-nous faire confiance? 

Et comme preuve que nous pouvons lui faire confiance, Jésus nous offre cette parabole d’un homme à qui le maître du domaine confie la gestion de ses biens jusqu’à son retour. Cet homme dont parle Jésus, c’est vous, c’est moi. Pour nous prouver la confiance qu’il nous porte, Jésus nous offre de veiller sur sa Parole, d‘en prendre soin, de la faire connaître et grandir dans les cœurs. Il a tellement foi en nous, tellement confiance en nous que, non seulement il nous établit en maître pour veiller sur sa Maison, mais qu’il se retire pour nous donner toute la latitude voulue pour garder sa Maison.  Et comme si ce n’était pas suffisant, il ajoute qu’à son retour, il ne forcera pas la porte, il frappera à la porte et il n’entrera que si nous lui ouvrons. Et à ceux qui lui ouvriront, il assure qu’il les fera passer à table et les servira. Plus que ça, tu meurs, disent les jeunes. Le véritable trésor qui ne déçoit jamais est cette confiance indéracinable que Dieu nous porte, cette confiance qui est au cœur de la petite voie de Thérèse de Lisieux.

Ce matin, laissons-nous atteindre par cette confiance de Dieu qui a trouvé bon de nous donner, de nous confier son Royaume à implanter dans les cœurs. Devant cette confiance de Dieu  - plus que ça, tu meurs ! -  il nous est demandé d’avoir foi en lui comme lui croit en nous. Veillez, soyez sans crainte, restez en tenue de service malgré les démesures de la tâche. Garder la foi comme Abraham qui, grâce à la foi, se vit confier une descendance aussi nombreuse que les étoiles.

Jésus ne joue pas à la cachette avec nous. Pour rendre notre attente moins périlleuse, notre foi moins périlleuse, il tourne nos regards vers l’avenir qui nous attend pour que nous puissions bien vivre le présent. Heureux le serviteur que le maître trouvera en habit de travail (Lc 12, 42). Jésus nous prévient que ce temps d’attente, ce temps de la gestion de son Évangile rencontrera toutes sortes de défis. Celui qui aura persévéré jusqu’à la fin sera sauvé (Mt 10, 22).Le chemin de la foi en sa Parole, le chemin d’annoncer son Évangile comme celui de gérer la Bonne Nouvelle n’est pas facile. Il est rempli d’embuches.  Le disciple n’est pas plus grand que son maître.  

Voilà bien notre défi quotidien : nous tenir éveillés, attendre que la semence porte du fruit. Pas évident pour une culture comme la nôtre qui insiste pour avoir tout, tout de suite. Pas évident de croire que la Bonne nouvelle demeure une «bonne nouvelle» tant elle ne semble pas être désirée, recherchée. Le cardinal Newman qui sera béatifié en septembre prochain à Londres, disait dans une homélie : Je considère comme remarquable ce mot “veillez”, employé par notre Seigneur; remarquable parce que l’idée n’est pas si évidente qu’il pourrait sembler à première vue. Nous ne devons pas seulement croire, mais veiller; pas seulement aimer, mais veiller; pas seulement obéir, mais veiller; veiller pourquoi? Pour ce grand événement, la venue du Christ. Il ajoute : [c’est] un devoir particulier qui nous est enjoint, un devoir tel qu’il ne vient pas naturellement à notre esprit.

Nous savons tous ce que cela signifie attendre un coup de téléphone qui ne vient pas; un ami annoncé qui retarde son arrivée; un emploi promis qui ne se réalise pas. Si nous voulons nous tenir éveillés, il nous faut répéter sans cesse, dit Jean Cassien dans sa 10e conférence sur la prière : Seigneur, viens à mon aide. Hâte-toi de me secourir (Ps 69,2).

Demandons à Marie, dont ce sera la grande fête dimanche prochain, qu’elle n’en finisse pas de nous tenir en éveil, qu’elle n’en finisse pas d’ouvrir nos yeux à la confiance que son Fils nous donne pour faire réussir l’autre, comme aimait le dire l’Abbé Pierre, à attendre Jésus qui vient à nouveau vers nous dans son Pain. AMEN.