2012- C - Lc 2, 41-51a Saint Joseph - grandeur de la modestie
Année B : fête de saint Joseph
Luc 2, 41-51a : grandeur de la modestie
Il n’est pas facile de parler de quelqu'un dont le langage est silence, qui écoute une voix entendue durant son sommeil et dont la vie est des plus modestes, des plus rudes, celle de charpentier (Mt 13, 55), une vie obscure, cachée, celle de simple artisan dépourvu de tout signe de grandeur personnelle (cf. Paul VI, 19 mars 1969).
Pourtant, il y a dans cet homme-effacement que Dieu avait formé pour Marie (Esprit Fléchier, 1632-1710) que l'évangile présente comme juste (Mt 1, 19), serviteur fidèle et prudent (Mt 24, 45); il y a dans sa manière de vivre qui est loin d'être spectaculaire et que le saint Frère André, fondateur de l'Oratoire-Saint-Joseph (Montréal), a compris, quelque chose à contempler : une vie belle, heureuse, très heureuse, qui dégage le profil d'une vie intérieure de grande qualité, abandonnée à la Providence et vécue dans une admirable simplicité. C'est le profil de toute vie consacrée, «engagée» au service au Seigneur. Le profil de tout chrétien. Être chrétien n’est jamais affaire de spectacle à donner au monde mais une affaire de silence et de contemplation.
L'Évangile et Luc spécialement, décrit ce que fit Joseph. Il passe sous silence que ses journées se vivaient dans la contemplation du mystère caché [de Dieu] (Col 1, 26) qui a établit [en lui et chez lui] sa demeure (Jn 1, 14). C'est son insondable vie intérieure (Benoît XVI) et - faut-il le soupçonner - la répétition de sa mantra «Jésus», diraient les pères orientaux, qui lui firent garder le cap vers une vie sereine, débordante d'enthousiasme d'être au service des siens.
Joseph ne fut jamais troublé malgré les événements presque «incroyables» qu'il a connu tant sa contemplation de Dieu était plus forte que les «surprises» de la vie. Alors que tout lui suggérait de perdre confiance en Marie, de la laisser tomber, de la répudier en secret (Matthieu),alors qu'il avait toutes les raisons pour s'irriter, Joseph est resté dans l'émerveillement. Il n'a perdu ni le fil de la merveille (Christiane Singer), ni sa noblesse et quiétude intérieures en se refusant de porter attention aux glaives qui ont traversé son cœur d'époux et de père adoptif. Il aurait été plus juste d'entendre le vieillard Siméon (Lc 2, 35) prédire non seulement à Marie, mais au couple se présentant dans le temple, qu'un glaive les blessera d'une vive flamme (Jean de la Croix).
Saintetés, heureuse celle qui a cru ! Mais n'oublions pas d'ajouter : heureux aussi celui, Joseph, qui a cru. Modèle de foi : acceptons comme lui les événements-glaives que façonnent toute vie.
Modèle de silence : laissons-nous contaminer par sa vie intérieure, imprégner par sa contemplation du mystère de Dieu qui se dévoile sur le terrain de notre quotidien.
Modèle de générosité : mettons-nous avec lui au service de notre famille religieuse, de nos familles qui ont tant besoin d'une présence réconfortante aux heures de grandes détresses qu'elles vivent.
Modèle d'effacement : pour paraphraser Paul (Ph 2, 6-7), Joseph qui était près de Dieu, n’a pas jugé bon de revendiquer son droit d’être traité comme tel. Il ne s'en est pas vanté!
Modèle d'un vrai croyant : avec Marie, il s'est mis à l'école de son fils, cette sagesse qui grandissait sous ses yeux. Il a touché, vu, contemplé le Verbe de Vie. Il a appris, en vivant dans l'intimité de Jésus, dans la famille de Dieu, l'essentiel de son message, celui de porter un regard de juste sur le monde, qui relève les humbles.
À votre contemplation: celui que le Père Salingardes appelle le saint de la nuit nous convie à une vie d'effacement, de silence et de contemplation. Pas facile ! Nous devenons des Évangiles vivants non en faisant beaucoup de bruit mais par une vie d'enfouissement en Dieu. Ce chemin pourtant si peu recherché à l'heure où l'exploit et la visibilité sont la marque de la réussite, confirme que nous vivons à l'ombre du Père à la manière du Fils et de Joseph. AMEN.