2013 - C: Mc 12, 1-12 Lundi 9e semaine ordinaire - l'envoyé du Père à la vigne:
Année C: Lundi 9e semaine ORDINAIRE (Litc09l.13)
Marc 12, 1-12 : l'envoyé du Père à la vigne
Le Jésus de Marc n'a pas cherché à faire des sermons, à donner des homélies ni à longuement théoriser sur son projet de voir naître une terre humaine, harmonieuse, aux fruits de justice, d'égalité, de respect mutuel. Il a opté pour le langage des paraboles, celui des semailles, d'un banquet de noces, des vignerons homicides.
Trop souvent cette page porte nos regards sur le comportement inadéquat, répréhensible des vignerons. Elle évoque plutôt la joie de rentrer à la maison, le travail terminé, au soir de la vie, d'être accueilli à une table servie par le maître de maison lui-même. Cette parabole nous explique pourquoi Jésus est venu habiter notre terre.
La parabole des vignerons homicides décrit un acte recréateur, non un acte de punition, un acte d'un amour sans limite aux seules fins de voir malgré un comportement tout repli sur eux des vignerons, une terre donnant de beaux fruits, une terre neuve, une nouvelle création (Gal 5, 13-15), celle d'avant la fondation du monde (Ep 1, 5-10).
Sa finale nous retourne de l'intérieur tant elle confirme la grandeur, la profondeur de l'amour d'un Dieu qui englobe tous les humains en Celui qu’il reconnaît pour son Fils unique. Elle nous arrache d'une terre fratricide vers une autre terre plus fraternelle. Elle redonne un tissu de beauté à une autre manière de vivre que celle des vignerons qui n'est pas de toute beauté.
La mise à mort du Fils du propriétaire de la vigne révèle en acte un Dieu qui est pour nous (Rm 8, 31) et non contre nous. Un Dieu dans un apparaître tout nouveau. Un Dieu dépouillé de la gloire, commencement de cet acte recréateur de l'état d'union du début du monde, celui d'Adam vivant dans un environnement divin, paradisiaque.
Paul résume bien l'histoire des vignerons quand il écrit aux Corinthiens (2 Co 5, 17-20) : si quelqu’un est en Christ, il est une créature nouvelle. Le monde ancien est passé, voici qu’une réalité nouvelle est là. Tout vient de Dieu qui nous a réconciliés avec lui par le Christ et nous a confié le ministère de la réconciliation. Car de toutes façons, c’était Dieu qui en Christ réconciliait le monde avec lui-même, ne mettant pas leurs fautes au compte des hommes et mettant en nous la parole de réconciliation.
Jésus parlait de sa vigne en connaissance de cause. Il en parlait comme quelqu'un qui vivait une grande intimité avec elle. Par cette image, il a montré que l'arrivée d'une terre neuve passait par la Croix. S'accomplissait sur la Croix qui révèle le mystère inconnu jusque-là, à savoir l'instauration d'une fraternité humaine universelle.
Sainteté, cette parabole des vignerons homicides lance un appel urgent : il faut sauver l'humain de son comportement d'homicide. Sauver l'humain dans sa dignité. Notre quotidien est plein de dangers, d'ouvriers qui acceptent jusqu'à tuer pour tout s'approprier. Ce n'est pas un appel à «sauver son âme» mais à sauver l'humain que nous lance cette parabole. À chaque fois aujourd'hui où l'on pose un geste de philanthropie, nous actualisons la finale de cet évangile en sauvant l'humain d'une vie où la dignité n'est pas respectée.
Cette dignité ne se limitera jamais aux membres d'une «religion» ou à un territoire clairement délimité. Au contraire, tous les humains de tous les temps et de tous les pays, jusqu’à nous, ont cru, demandé, attendu, espéré ces retrouvailles avec une terre neuve, que nous chrétiens, appelons salut. Un mot sommet qui a plutôt mal vieilli autour de nous.
À votre contemplation: Il lui restait encore un fils venu redire à toute l'humanité que nous sommes encore et malgré nos comportements ses fils aimés. Paul nous dit quelque part que nous, les ambassadeurs du Christ, sommes envoyés pour dire et clamer : nous sommes cette terre cultivée dont la fleur reproduit la beauté de l'Époux (Grégoire de Nysse, vers 335-395). AMEN.