2021-Mt 23, 1-12 -samedi de la 20e semaine ORDINAIRE- ne nous scandalisons pas trop vite
Année B : samedi de la 20e semaine ordinaire (litbo20s.21)
Mt 23, 1-12 ; Ruth 2, 1-3.8-11 ; 4, 13-17 : ne nous scandalisons pas.
C’est une vérité de la Palice que d’affirmer que notre Église est en crise. Crise de crédibilité. Crise de cohérence. Crise de cléricalisme. Crise de la foi. Crise et non conflit. Un conflit divise. Une crise fait grandir. Ce mot émerge quand il y a un manque de cohérence, de transparence. Nous ne vivons pas jusqu’au bout (Cf. Jn 13, 1) notre foi. Nous ne désirons pas d’un grand désir (Cf. Lc 22, 15) l’effacement de nous-mêmes qui montre que le Christ vit en moi (Ga 2, 20). Il y a un mur entre notre dire et notre action. Jésus n’habite pas en nous complètement.
L’épitre de Jacques (1, 22) anticipe cette incohérence : soyez les réalisateurs de la Parole et pas seulement des auditeurs qui s’abuseraient eux-mêmes. Nous ressemblons à des gens qui s’observant dans un miroir, préfèrent s’en détourner pour oublier ce qu’ils voient. Cette page est un véritable défi pour ceux qui l’entendent. Défi de cohérence bien difficile sinon impossible. Qui est parfaitement cohérent ici ?
Nous sommes des gens en perpétuel tiraillement entre notre foi et la préservation de nous-même. Entre Le servir et se servir. Pourtant, Jésus unit en lui l’humain et le divin, son moi et celui de son Père. Qui me voit, voit le Père (cf. Jn 14, 9). Notre adhésion à Jésus connait des failles. Notre grand désir d’être Lui est affaibli par l’animalerie (Thérèse d’Avila) d’une vaine recherche de soi-même.
Il y a dans ce déchirement quelque chose de très humain. Si Jésus n’avait que prêché son message n’aurait certainement pas franchi les petites collines d’Israël. La bonne nouvelle est toujours liée à un combat, un tiraillement, à une distanciation obligatoire de soi-même.
L’incohérence se lit dans chaque page de l’évangile.
Il y a la tendresse du père miséricordieux qui attire le fils prodigue, mais qui suscite l’indignation et la rancœur du fils aîné (cf. Lc 15, 11-32).
Il y a la générosité du propriétaire de la vigne qui offre le même salaire aux ouvriers, mais qui enrage ceux de la première heure qui se sentent offensés (cf. Mt 20, 1-16).
Il y a la bonne semence qui donne du fruit- cent, soixante, trente pour un, - mais qui réveille la jalousie de l’ennemi qui s’empresse à semer l’ivraie durant la nuit (cf. Mt 13, 24-30.36-43).
Il y a la magnanimité de cet homme qui envoie son fils aux vignerons, mais qui déchaîne une férocité hors de toute mesure et le tue (cf. Mt 21, 33-46).
Il y a la proximité de Jésus qui mange ou côtoie des gens peu acceptables comme Zachée, Lévis, la Samaritaine, mais qui provoque le mépris chez ceux qui se croient justes.
Et devant ces incohérences d’hier et d’aujourd’hui, incohérences nombreuses aussi au sein de notre Église, Jésus semble nous dire : ne nous scandalisons pas.
Jésus ne s’est pas scandalisé en voyant que son annonce aux pauvres est toujours accompagnée d’un cri désapprobateur. Il ne s’est pas scandalisé parce que son année de grâce a suscité de vives oppositions démoniaques. Il ne s’est pas scandalisé devant la lenteur de ses disciples à délaisser leurs intentions de rechercher la première place. C’est dans l’incohérence que l’évangile se diffuse.
Ça prend une vie entière pour réaliser que la cohérence est libération. Mieux encore, elle est délivrance. Ne nous scandalisons pas. L’incohérence fait partie intégrante de nos vies. Elle colle à la peau de l’Église comme un virus indélogeable dont le seul vaccin connu est l’accueil de l’Esprit de Jésus. Malgré toutes ces incohérences, Thérèse d’Avila écrit noir sur blanc que Dieu continue à habiter en nous.
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