2020-A-Jn 6, 35-40 - mercredi 3e semaine de PÂQUES- diminuer et croître
Année A : mercredi de la 3e semaine du Temps Pascal (litap03me.20)
Jn 6, 35-40 ; Ac 8, 1b- 8 : diminuer et croître à la fois.
Autrefois, Dieu se rendait visible dans la manne qui tombait du ciel. Ce rendez-vous de Dieu avec nous est devenu vérité dans l’étable de Bethléem. Et le verbe s’est fait chair. Maintenant, Dieu se rend visible sous une autre forme. Prenez et mangez, ceci est mon corps. Il ne s’agit pas seulement de savoir cela, mais d’expérimenter que c’est maintenant dans nos étables, nos pauvretés, nos cœurs que le Verbe se fait chair. Et cela change tout.
La crèche est le mémorial de l’abaissement de Dieu. L’eucharistie est le mémorial de l’étable de Bethléem. Nos cœurs sont le mémorial de la résidence officielle de Dieu. Chaque jour, écrit François d’Assise dans une de ses Admonitions (1,17), il vient lui-même à nous sous une humble apparence. C’est dans la crèche de nos coeurs que désormais Dieu naît chaque jour. La crèche, la croix et Pâques s’unifient sans se fusionner dans l’eucharistie. Celui qui fut déposé dans une mangeoire devient nourriture : mon Corps est la vraie nourriture, mon Sang est la vraie boisson, celui qui mange ma Chair et celui qui boit mon Sang a la Vie éternelle.
L’incarnation de Jésus se vit dans l’eucharistie. L’eucharistie nous immerge dans l’incarnation. Autant dans son incarnation, sur la croix que dans l’eucharistie, Jésus donne ce qu’il lui reste à donner : sa vie. Jésus ne garde rien pour lui. La grandeur de Dieu, c’est qu’il est totalement donné (Maurice Zundel).
Totalement donné : Jésus a vécu en solidarité avec tout le monde. Il a tout partagé : son père qui est notre Père (Lc 11,2-4), sa vie, sa mort, ma vie, nul ne la prend, mais c’est moi qui la donne (Jn 10,1/7-18), sa résurrection je leur ai donné la gloire que tu m’as donnée (Jn 17, 22), son Esprit donné à la Pentecôte, recevez l’Esprit saint (Jn 20, 21-22). Jésus a tout partagé parce qu’une vie sans partage n’existe pas. Elle n’est pas la vraie vie. Une vie sans pain n’existe pas.
Au soir du jeudi saint, Jésus n’a pas laissé un acte de dévotion axée sur une présence réelle. Le premier but de ce pain n’est pas de nous maintenir en état d’adoration. Jésus n’a jamais voulu se placer au centre. Pour lui, le centre, ce sont les autres. C’est un exemple que je vous donne. L’eucharistie modèle un chemin pour croître et diminuer à la fois. En goûtant sa chair toute sainte brulée sur l’autel de la Croix, en goûtant le vin de son sang, chante un hymne du temps pascal, nous vivons de la vie de Dieu.
Manger ce pain signifie sortir de l’étroitesse de sa petite vie pour naître à l’immensité de la vie de Dieu en nous (Édith Stein). Nous devons aller à la sainte communion […] pour que nous y cessions nous-mêmes d’être ce que nous sommes (Charles de Condren). Communier nous fait sortir de nos embourgeoisements. François d’Assise a bien compris cette diminution de Dieu et notre abaissement quand il écrit dans sa lettre à l’Ordre (no 29): ne retenez pour vous rien de vous, afin que vous receviez tout entier celui qui se donne à vous tout entier.
C’est tout un défi de sortir de l’étroitesse de notre petite vie, de nous engager à devenir créature nouvelle chaque fois que nous le recevons. Il me fait neuve chaque matin, écrit Édith Stein. Diminuer et croître à la fois est une prodigieuse merveille, car ce pain nous invite à construire cette terre fraternelle où il n'y a plus ni Juif ni Grec, il n'y a plus ni esclave ni libre, il n'y a plus ni homme ni femme; car tous vous êtes un en Jésus-Christ (Ga 2, 28).
Ce pain nous grandit. Une grandeur qui repose sur l’opinion d’autrui, non pas [celle] que nous fabriquerions artificiellement, en focalisant l’attention des autres sur nous, mais une grandeur […] qui soit pour tous la révélation discrète d’une présence […] d’une vie totalement donnée (Maurice Zundel). C’est justement au nom de cette vie totalement donnée que Jésus fut exécuté parce que son comportement dérangeait les notables d’une pratique rigoureuse de la loi.
À votre contemplation : ce pain intensifie notre intimité sans fusion, sans confusion ni mélange avec Jésus. On est Lui et Lui demeure soi. On est tout ce qu’il est. On a tout ce qu’il a (Robert de Langeac).
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