2017-A-Lc 6, 43-49- samedi 23e semaine ordinaire- nous souvenir du roc Jésus
Année A : samedi de la 23e semaine ordinaire (litao23s.17)
Lc 6, 43-49; Tm 1, 15-17: nous ressouvenir du roc Jésus.
Nous sommes habitués à lire l’évangile en censurant ses exigences, dont celle de bâtir sur du solide. Le solide prend le visage de notre fidélité à demeurer dans l’intimité de Jésus. Sur ce terrain, nous ne pouvons pas être d’une fidélité parfaite. D’une solidité parfaite.
Pour éviter toute érosion, il est nécessaire de nous demander à répétition si notre vie est construite sur le sable mouvant de nos impulsions, de nos envies, de nos ambitions ou si elle repose sur la seule chose qui nous est nécessaire : Jésus. C’est en faisant mémoire de l’étincelle qu’a provoquée une rencontre heureuse, touchante avec le Christ que nous maintiendrons bien vivante cette seule chose nécessaire. Le roc, c’est l’expérience d’une rencontre vraie avec Jésus.
Les évangélistes ne cessent de nous rapporter des rencontres avec Jésus qui ont transformé des vies. Chacune a allumé dans les cœurs des étincelles de joie que ni les vents contraires, ni les tempêtes, ni les épreuves, ni les échardes dont parle Paul n’ont réussi à éteindre. Songeons à Jean et André (cf. Jn 1, 39). Le déclic a été si pénétrant qu’ils invitèrent Simon-Pierre, puis Philippe. Songeons à Matthieu, à Marie-Madeleine. Jésus est un dangereux incendiaire, un expert pour allumer des incendies dans les cœurs.
En gardant cette rencontre en éveil, mieux, en nous ressouvenant de cette rencontre que nous éviterons de nous installer dans la routine et une sorte de laisser-aller vers le minimaliste. Se ressouvenir, selon le diction-naire Larousse, c’est se souvenir en permanence d’une rencontre alors que le simple souvenir est passager. Nous ressouvenir, c’est plus que de penser à quelque chose. C‘est de vivre en permanence ce quelque chose. C’est le roc sur lequel s’appuient nos vies.
La joie indique que nos vies sont ancrées sur le ressouvenir. Avons-nous en nous, dans nos cœurs, le vent de la joie ? (Audience du 30 août 2017). Ce roc connaît des fissures quand nous ne passons pas nos jours dans la joie (Ps 89, 14) et que s’ankylose notre goût de rester en tenue de joie.
Il s’agit beaucoup plus que de savoir que Jésus est le roc de nos vies. François Malaval (XVIIIe siècle) dans Pratique facile de la contemplation, donne cet exemple. Je peux me souvenir que j’ai déjà été en présence d’un roi. Je peux aussi me ressouvenir que je suis en présence d’un roi. Inutile, dit-il, de dire mon Dieu, je crois que vous êtes ici [mais plutôt dire] mon Dieu, vous êtes ici (cf. Oraison # 213, février 2017). Ça change toute la perspective. Nous ressouvenant, nous sommes assurés que notre oui ne serra jamais un non (cf. Mt 5, 37).
Toute sa vie, Marie s’est ressouvenue de cette rencontre inaugurale qui a transformé sa vie. Elle a gardé bien vivant ce moment de l’annonciation. Pour elle, ce ne fut pas un simple événement de quelques instants. Ce moment a été le roc sur lequel elle a appuyé toute sa vie. C’est tellement facile de s’évader dans de beaux souvenirs. C'est tellement plus exigeant de nous ressouvenir, de faire mémoire pour utiliser le langage litur-gique. C’est pratiquer ainsi au quotidien le souvenir d’une rencontre marquante avec Jésus qui a transformé notre vie.
Saint Vincent de Paul disait ceci: il y en a plusieurs qui se contentent des doux entretiens qu’ils ont avec Dieu dans la prière; ils en parlent même comme des anges; mais est-il question de travailler pour Dieu, d’instruire les pauvres, d’aller chercher la brebis égarée, de visiter les malades? Hélas! Il n’y a plus personne. Récemment, le Père Lipari, o.c.s.o, écrivait dans sa lettre de la Pentecôte 2017 à son Ordre : nous voulons glorifier Dieu par notre vie, mais lui veut être glorifié par notre mort à nous-mêmes.
À votre contemplation: n’envoyons pas promener nos souvenirs dans les prés aux herbes folles, au sol mouvant. Conduisons-les plutôt à nous ressouvenir du Christ venu dans le monde […] pour nous faire miséricorde (1 Tm 16). AMEN.