2017-A-Mc 4, 35-41- samedi 3e semaine ordinaire- que rien ne vous trouble
Année A: samedi de la 3e semaine ordinaire (litao03s.17)
Marc 4, 35-41 : que rien ne vous trouble
Il y avait eu l’eau changée en vin, la tempête apaisée, la multiplication des pains, l’expulsion des démons, les multiples guérisons physiques, le pardon des péchés; ce sont des prodiges, des scènes d’exorcisme, qui appellent à contempler Jésus en profondeur. Ce sont des victoires qui éloignent de la peur et ouvrent sur un grand calme.
Nous lisons souvent l’évangile comme rapportant des événements extérieurs. Ce que nous avons vu. Ce que nous avons entendu. Mais l’évangile, c’est plus que de voir, c’est plus que d’entendre. C’est quand il se fait en nous un grand calme, pour citer le même passage chez Luc (8, 24), que se réalise l’évangile en nous. Chaque prodige de Jésus, chaque prise de paroles, chaque rencontre ouvrent sur un grand calme.
L’activité principale de Jésus est de susciter dans les cœurs un grand calme. C’est la motivation principale de l’agir de Jésus qui émerge de sa prière avec le Père. Sur la mer comme dans les autres prodiges qu’il accomplit, Jésus transmet ce qu’il vit. Jésus ne panique pas au soir du jeudi saint tant il éprouve la présence de son Père en lui. Jésus ne panique pas dans ses affrontements permanents avec ses opposants. Son calme porte la signature de son union permanente avec le Père.
Ce calme est déroutant pour les témoins de la scène (1,27; 4,41), foudroyés de stupeur devant la puissance de la tempête et surtout devant la puissance d’une parole qui impose le silence au vent menaçant. Une parole qui réveille les disciples au mystère Jésus. Ce n’est pas Jésus qui dort au milieu de la tempête, c’est plutôt la foi des disciples qui est somnolente. Question : ce calme de Jésus dans un environnement troublant n’est-il pas le fruit d’une vraie rencontre avec son Père ?
C’est quand nous sommes dans l’œil du cyclone, autant extérieur qu’intérieur, quand les vagues sont fortes et les marées fracassantes et dévastatrices, comme l’expérimentent les apôtres, que nous pouvons sentir la profondeur de nos liens avec Jésus. Les textes de ce jour nous invitent à nous interroger sur la qualité de nos rencontres avec Jésus. Restons-nous avec lui aux heures les plus dévastatrices de nos vies ?
Au début de la sixième demeure, Thérèse d’Avila écrit: au milieu de la tempête [...] au moment le plus inattendu, par un seul mot, [Jésus] dissipe tout si promptement qu’il semble n’y avoir eu de nuages dans l’âme qui se retrouve alors ensoleillée et plus consolée que jamais.
Cette tempête décrite par Marc n’est qu’un prélude à une autre tempête où les disciples auront l’impression de couler à fond. Ils s'enfuiront de peur devant ce qui leur arrive. C’est le jour où Jésus est mort. Tellement écrasés, anéantis par les événements, ils sont incapables, devant la barque coulée de Jésus, de crier vers le Seigneur (Ps 117). Ce jour-là, ils ne sont pas passés sur l’autre rive avec Jésus. Vivant, leur cœur est mort. Tout s’écroule dans leur tête. Trois jours plus tard, Jésus les salue et leur démontre qu’il est toujours capable de calmer les tempêtes, et même plus encore, de les ressusciter, eux qui étaient morts de crainte et de découragement. Après la destruction, il y a la rédemption.
Quand les tempêtes intérieures nous poussent dans nos retranchements, quand nous sommes plongés dans une impression profonde d’être loin de Dieu en vivant une nuit de foi écrasante, alors que nous crions notre besoin de rester avec le Christ, voilà un verbe de mouvement, dit le pape François, parce qu’il implique nécessairement de se déplacer et de se mettre à sa suite.
Rester avec Jésus parce que c'est plus nécessaire que le pain, écrit Madeleine Delbrel dans Nous autres, gens de la rue (p. 72). Rester avec Jésus pour laisser pénétrer en nous une parole, silence, tais-toi, jusqu’à ce qu’elle s’accomplisse en nous. C’est cela qui nous fait disciples et moniales. AMEN.