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Année A : Lundi du temps de NOËL (Litan00l.10)
Jn 21, 20-24 : saint Jean

Nous vous annonçons ce que nous avons entendu, contemplé, vu et touché: La vie s'est manifestée et nous l'avons contemplée.  Mot imprévisible, impensable mais aussi impossible à entendre pour l’oreille humaine. Devant ces mots, si nous avions vraiment la foi dans le mystère de l’Incarnation, nous en aurions le vertige. Pourtant ce sont par ces mots qui donnent le vertige, que s'ouvre l'exhortation apostolique Verbum Domini.

En ce surlendemain de Noël, nous sommes ensemble non seulement pour entendre ces mêmes mots, le Verbe s'est fait chair, mais pour vibrer comme les bergers, comme Jean, au fait que Dieu nous a préparé quelque chose de meilleur encore : il nous donne de voir le Verbe de Dieu (bienheureux Guerric d'Igny).

La foi nait de ce qu'on entend (Rm 10, 17). La sagesse de Dieu n'ignore pas qu'elle s'enracine plus vite et plus profondément en nous quand l'Impalpable est touché par nos mains humaines, quand le Non-visible se laisse voir à nos yeux de foi, quand la Parole, qui a créé si facilement le monde mais qui ne l'a pas recréé si facilement, se rend audible à nos oreilles.

En ce lendemain de Noël, nous sommes dans le temps de la contemplation que l'évangéliste, théologien et apôtre Jean, nous donne à contempler. Nous ne sommes pas créés pour rendre service à Dieu mais pour l'adorer, venez adorer, le contempler aussi. Et contempler, c'est se vider de tout pour le Tout. C'est avoir le cœur, les yeux du cœur tournés vers le Seigneur. C'est admirer, nous émerveiller au point de nous oublier nous-mêmes.  C'est nous laisser transformer, devenir totalement celui qui s'est totalement donné à nous. Livré pour nous. Un tel regard pénétrant est beaucoup plus que des instants de prière, c'est une vie toute entière, vécue en forme d'Évangile, de Bonne Nouvelle qui ne s'impose pas mais qui fait autorité.

Avec Jean, comme Jean, contemplons celui que les anges désirent contempler (1 Pi 1, 12). Contem-plons le Verbe que le Seigneur nous a donné (Lc 2, 15).Contemplons la Parole de Dieu, vivante et efficace (He 4, 12)qui s'est rapetissée, couchée dans une mangeoire. Contemplons celui que le Père engendre éternellement sans mère dans les cieux [et qui] est né de la Vierge, sans père sur la terre (saint Romanos de Mélode, vers 560). Le monde ancien est disparu, toute chose est nouvelle (2 Co 5, 17). La lettre recule, l'Esprit triomphe (Rm 6, 7). 

Mystère de foi: Dieu vient sur terre alors qu'Il est tout entier dans le ciel et nous, humains, nous entrons dans le ciel alors que nous demeurons avec nos pesanteurs, tous entiers sur la terre. Admirable é-change. Un mode de vie céleste est planté sur la terre.

Saint Paul a bien saisi le sens de Noël quand il dit : Jésus est né, s'est livré pour moi (Ga 2, 20).Ce pour moi donne de la beauté à nos vies. Au commencement du monde, Dieu voulait nous attirer par sa beauté. Ce qui est presque incroyable, cette Beauté est là devant nos yeux. Ne l'apercevons-nous pas? Plus nous la contemplons, plus elle croît, grandit en nous. Plus nous devenons participants de sa Beauté.

Saintetés, devant ce pour moi, devant cette naissance pour moi, devant cette beauté pour moi, devant celui qui s'est laissé voir, touché pour moi, il nous reste à dire pour toute la durée de notre vie : pour toi je veux vivre en forme d'Évangile. Comme l'exprime saint Bonaventure cité par Benoît XVI dans Verbum Domini (#8) et qui fait voir toute la beauté de ce pour moi, désormais toute créature est parole de Dieu puisqu'elle proclame Dieu.  Paul nomme cela, devenir des êtres nouveaux.Quel programme pour devenir accomplissement!

À votre contemplation, devant ce Dieu qui nous ouvre à sa divinité, ce serait un contresens que de se contenter d'une vie médiocre, vécue sous le signe d'une éthique minimaliste et d'une religiosité superficielle (Jean-Paul II, Lettre nouveau millénaire, #31). Allons nous aussi jusqu'à Bethléem pour voir cette parole que Dieu a réalisée et qu'il nous a montrée  (Lc 2, 15). AMEN.