2011-A-Mtt13, 24-43- Dimanche 16e semaine ordinaire -N'arrachez pas l'ivraie
Année A : Dimanche 16e semaine ordinaire (litao16d.11)
Matthieu 13, 24-43- N'arrachez pas l'ivraie
L'une de plus belles choses qu'il nous est donné d'admirer chez Jésus, c'est son regard. Regard fascinant qui nous fascine aussi. Dans le regard de Jésus, celui qu'il nous présente dans cette parabole, nous retrouvons ce premier regard du Père au premier matin du monde : Dieu vit que cela était bon. Ce matin, mon appel est simple: Regardez longuement, passionnément le regard de Jésus. Le but de notre vie chrétienne est de faire nôtre le regard du Christ sur le monde, sur nous. Regard flamme ardente (Ap 1, 14), regard de guérison parce qu'il ne voit que le bon et non l'ivraie en nous.
Aujourd'hui il y a tant de chose à regarder. Nous vivons dans un monde cassé (Gabriel Marcel), où tant de zizanies existent : crises politiques, terrorismes, catastrophes naturelles, démesure de la violence, pillage de notre planète terre. Nous vivons dans une église en crise, dont la voix n'est plus crédible. L'abondance de l'ivraie qui attire nos regards ne manque pas. Mais voyons-nous la beauté de ce qui est semé ? De ce qui est en gestation dans le profond des cœurs ? Voyons-nous au milieu de tant de bourrasques qui attirent nos regards, la présence du Christ, assis dans la barque avec nous dans la tempête (cf. Mc 4, 40) ?
Dans l'évangile, Jésus nous fait voir clairement que notre regard est le symbole de notre moi profond. Il est reflet de ce que nous sommes (cf. Mt 6, 22-23). Il existe une maladie des yeux qui fait voir les choses à l'envers. La réaction des serviteurs le confirme. Je le répète: le but de notre vie chrétienne est de développer en nous le regard de Jésus.
Il y a dans le regard de Jésus, dit Christian Bobin, (Ressuscité 2001, p. 155) plus de mots que dans tous les livres du monde. Jésus voit ce qu'il est. Son regard nous livre qui il est. Son regard sur nous dit qui nous sommes : du bon grain. Que ce soit ce regard d'émerveillement posé sur le jeune homme riche, que ce soit le regard étonnant posé sur le pharisien Matthieu, que ce soit le regard qui donne des ailes à la femme près du puits de Jacob, les regards de Jésus sauvent. Ils ne sont jamais des regards de condamnation. Jésus sait voir la fatigue de la foule qui le suit depuis trois jours. Il sait voir l'aveugle-né emmuré dans ses ténèbres, les dix lépreux exclus du village. Il voit l'angoisse de sa mère au pied de la croix. Jésus est né pour voir autrement que nous. Pour lui, le mal ne peut être éliminé, il doit être traversé.
Avouons-le, son regard de patience ce matin - laissez-les pousser ensemble jusqu'à la moisson- et dont la première lecture faisait l'éloge, cadre mal avec notre impatience à vouloir que tout se règle tout de suite. Il nous fait saisir qu'il faut du temps, beaucoup de temps, pour pouvoir distinguer le bon grain dans l'ivraie. Il faut une longue et permanente contemplation de l'histoire de nos vies pour observer que nous sommes lents à devenir plus humains. Nous sommes lents à devenir humains à l'image du premier né d'une terre nouvelle. Àdevenir une Église selon son cœur. Ce qui nous est connaturel, c'est cette tendance à être moins qu'humain que l'évangile traduit par le mal. La loi du Talion se porte bien en nous et autour de nous.
Dans sa lettre ouvrant le nouveau millénaire, Jean-Paul II nous invitait à modeler nos regards sur le regard du Christ parce que c'était sans doute la valeur plus sûre pour les siècles à venir. Dans l'évangile, Jésus confirme que la plupart d'entre nous, sommes privés de ce regard perçant. Vous avez des yeux et vous ne voyez pas. Si ton œil est sain, ton corps tout entier sera dans la lumière(cf. Mt 6, 22-23).Notre regard est le meilleur chemin qui nous montre notre moi profond. Il existe une maladie des yeux qui fait voir les choses à l'envers. La réaction des serviteurs le confirme. Je le répète: le but de notre vie chrétienne est de développer en nous le regard de Jésus.
Depuis l'ère de la télévision, du téléphone intelligent, du Ipad, Iphone, nous avons devant nous un flux permanent, un ruissellement ininterrompu d'images, tout coule et rien ne reste. Nous voyons tout mais nous ne voyons rien. Notre œil ne contemple plus. Il avale. Un proverbe clame: Si l'œil ne contemple pas, l'œil ne verra pas.
Comme l'exprime une hymne liturgique du temps du carême, change ton regard et la vie jaillira. Change ton regard et la vie renaîtra. Projetons sur ce pain un regard neuf et nous évangéliserons le monde. AMEN.