2007- A : Vendredi 2e semaine avent -Mtt 11, 16- 19 Jouer de la flûte
Année A : Vendredi 2ième semaine AVENT (litaa02v.07)
Matthieu 11 16- 19 Jean de la Croix Jouer de la flûte
Le divertissement est de première importance aujourd'hui. Se divertir pour oublier nos inquiétudes, nous distraire d’un présent difficile. Nous vivons nos vies comme un long divertissement, à la manière des figurants d’un spectacle toujours à recommencer. Nous allons de « petites espérances en petites espérances » qui souvent nous déçoivent, ne se terminent pas comme nous le souhaiterions. Déjà au 3e siècle Grégoire de Nysse affirmait que ces manières de vivre – la fascination du plaisir, la soif de jouissance –«sont du domaine du paraître...Elles s'écoulent avec la nature éphémère du temps; à peine ont-elles paru exister, elles disparaissent à la façon de vagues sur la mer »... Cela nous enfonce dans l’assoupissement, l'insouciance, le relâchement. Mais Jésus vient là où il n’y a plus de vie, là où n’est que désordre, Il est attiré par nos malheurs.
Récemment (5 décembre) à l’émission matinale de Christiane Charest, le comédien André Montmorancy invitait le peuple québécois « à régler leur compte avec l’Église » qui défendait tout, empêchait de vivre. Il invitait à apostasier la foi. Un site Internet suggérait comment procéder. http://www.radio-canada.ca/radio/christiane/modele-document.asp?docnumer...
De multiples courriels d’approbation pour cette audace, furent reçus. Malgré mon déchirement à les entendre,- une Église « cancer », anti-liberté, « donneuse de leçons aux autres »- j’ai maintenu mon écoute pour y entendre les cris d’un « malaise québécois », d’un acharnement à dénigrer la foi chrétienne. Je ressentais vivement l’urgence d’un grand déménagement, pour faire naître « l’Eglise hors les murs ». Pour faire voir qu’elle existe dans les cœurs. Tout déménagement implique de nous défaire de nos vieilleries. Notre Église, humaine, fait au quotidien l’expérience qu’elle ne vit pas toujours de l’Évangile. Sa faiblesse nous montre qu’elle est habitée par un Autre.
Jean-Baptiste nous l’entendrons ces prochains jours, invitait les gens de son temps à faire un grand ménage dans leurs dieux, dans leurs traditions. Il invitait à se laisser distraire par rien, à dépoussiérer tout leur regard pour reconnaître un « glouton » de la vie parce qu’il en était, lui, un « possédé ». Cet appel de Jean-Baptiste est d’une grande actualité pour chacun de nous. Pour notre Église. Jean nous a montré un Jésus « glouton » d’un appel fascinant : « d’incliner l’oreille de notre cœur » comme «chemin», «arme», «prologue» pour entrer dans la vie. Jésus ne vient pas nous enlever nos divertissements. Il vient enlever nos illusions sur une manière de vivre qui conduit au néant. Jésus est « possédé » d’une vraie vie.
En ce temps de l’Avent 1577, pour avoir tenté la réforme de son Ordre, Jean de la Croix était enfermé à Tolède dans la prison conventuelle de ses frères Il voulait sortir la vie religieuse de son temps du divertissement, de la facilité. Il était habité par l’appel de Jean-Baptiste. Au sein de sa nuit obscure, il est « possédé » jusqu’au divertissement mystique par Jésus. Le mystère de Noël lui devient lumineux.
Contemplatives, contemplatifs, si la vraie vie, « la vie bienheureuse » dépendait de nos divertissements, si notre bonheur reposait uniquement sur des choses créées, tout deviendrait éphémère, relativité, subjectivité. Nous vivons sans savoir à quelle vie nous sommes appelés, incapables de prêter l’oreille et de préparer nos cœurs à une « bonne nouvelle », à une espérance : nous sommes faits pour un avenir de gloire. Nos vies ne sont pas qu’une dégénérescence de l’existence pour aboutir au néant du tombeau.
Jean Baptiste- si grand qu’on aurait pu le prendre pour le Christ - est venu. Il refusait le divertissement. Il ne fut pas écouté. Jésus- l’engendré du Père par l’Esprit saint - est venu. Il se disait « glouton » de bonheur. Il fut rejeté. « Si seulement tu avais été attentif à mes commandements, ton bonheur serait comme un fleuve » (Is 48, 18)vient de nous dire la 1ière lecture. « Ah ! si mon peuple m’écoutait » (Ps 80(81)! N’est-ce pas cela la maladie de nos cœurs ? Ne pas écouter, vivre endormi, assoupi par toutes sortes de divertissement ?
À votre contemplation: Jean est venu au soir du Jour, comme une «frontière entre deux testaments» (Augustin). Si seulement nous consentions à nous engager sur son chemin. Jésus est venu au matin du jour nouveau comme « le plus beau fruit sorti de la terre ». Si seulement « nous acceptions son enseignement salutaire » (1ière lecture). Que le chemin de l’un nous ouvre les yeux sur Celui que nous ne connaissons pas. Que celui de l’autre nous apprenne à danser de joie. AMEN
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