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Année A : Vendredi 1ière semaine AVENT  (litaa01v.07)
Matthieu 9, 27-31  deux aveugles crient à Jésus.

Quelque chose nous pousse en avant. En Avent.  Ce quelque chose, un hymne liturgique en parle comme « le temps d’un long désir » (E.201). Nous portons au plus profond de nous - et cela fait partie de notre être -  un désir qui nous dépasse. Désirer parce qu’au commencement de toute œuvre, il faut savoir regarder la fin. Désirer parce que nous rappelle saint Benoît dans sa Règle, le désir de Dieu est déjà, de par sa nature, une union à Dieu. « Dieu, en faisant attendre, élargit le désir; en faisant désirer, il élargit l'âme; en l'élargissant, il augmente sa capacité de recevoir » (Sauvé par l’espérance #33). Mais désirer quoi ?

Un père du désert, dans ce que l’on appelle des écrits apophtegmes, nous en suggère une réponse quand il dit que « Le moine -  c’est également vrai pour tout chrétien – doit être comme les chérubins : « tout œil ».  Désirer être «tout œil»- l’évangile nous dit cela à travers la scène des aveugles criant vers Jésus « aie pitié de nous »-  est l’un de ces grands commandements « qui fait marcher le monde »pour citer Charles d Péguy (le porche du mystère de la 2e vertu). Désirer sortir de nos aveuglements qui sont simplement des « absences de lumière (Einstein) ». Une toute petite étincelle de lumière peut faire reculer les ténèbres. Une voix intérieure nous rappelle sans cesse que nous sommes faits pour un « surplus d’être ». Un surplus d’œil. Nous sommes faits pour être fils comme le Fils même si nous sommes plus dissemblable que semblable.

Nous ne voyons pas très bien cette fin de toute œuvre : d’être fils comme le Fils. Nous n’en voyons pas très clairement le chemin. Si nous comptons sur nos propres forces nous n’irons pas très loin. Les deux aveugles s’en sont remis à Jésus, ont marcher dans la nuit vers Jésus avec cette foi, qui a tellement émerveillé Jésus, qu’il leur simplement ajouté « que tout se fasse pour vous selon votre foi ». 

Paradoxe, comme pour les aveugles, c’est justement ce manque de clarté dans nos regards- nous ne sommes pas « tout œil »- qui nous fait marcher, crier notre besoin de miséricorde. Dans nos obscurités,  nous vivons habité par cette confiance, « sauvés par l’espérance » qu’une rumeur incroyable retentit en nous,  qu’une Lumière aveuglante existe : il vient Celui qui donne de l’horizon à nos vies, Celui qui peut ouvrir ce qui est fermé, Celui qui peut nous faire voir, nous faire devenir « tout œil». « Seigneur, mon âme languit après ton salut » (Ps 119,174). Ces mots expriment bien nos états d’âme.  Si la Lumière tarde, attendons-là, elle viendra sûrement à son heure !

Contemplatives, contemplatifs, Dieu nous fait grâce à la fois de le voir et de ne pas le voir; de contempler cet Autre qui le premier voit la profondeur de notre foi qui se nourrit de doute et d’obscurité; de découvrir que c’est « par votre persévérance que vous obtiendrez la vie » disait Luc récemment. Dieu nous fait la grâce de la vision mais comme dans la nuit. Nous sommes des gens de la nuit qui ouvre sur la lumière.

L’avent donne l’infini de l’espérance, nous permet de respirer l’espérance, « prenez courage, voici votre Dieu, il vient lui-même et va vous sauver (Is 35,4) », d’entrevoir sa lumière, même de loin, depuis nos profondeurs, malgré nos distances aussi. Dieu nous fait grâce d’apprendre à le chercher parce que déjà il se montre à nous quand nous le cherchons, parce que déjà il nous guide à le chercher, à le trouver, à le montrer à la manière de Jean-Baptiste. Comme l’exprime saint Bernard « quelle surprise(nous éprouvons) d’être cherché par Dieu, (d’être touché par Dieu) quelle dignité (que) de chercher Dieu (St Bernard sermon pour l’Avent) ». Voici le temps d’être « tout œil », d’ouvrir nos yeux à autres choses que nos esclavages médiatiques. Le temps de rester éveillé, celui de la persévérance.

A votre contemplation : Ne nous laissons pas distraire dans notre marche par une culture qui nous aveugle, ne nous laissons pas devancer par personne non plus. Comme les aveugles de ce jour, humblement, courons vers Jésus, crions vers lui,  le « seul ami des hommes » (Sg 1,6). Recherchons-le, car il va se révéler à nous, il va paraître, il va se manifester, lui notre espérance. AMEN