2011-A-Mtt 8, 18-22 - Lundi 13e semaine ordinaire -mode tendance
Année A : Lundi de la 13e semaine ordinaire (litao13l.11)
Matthieu 8, 18-22 : mode tendance
Ce qui devrait attirer notre regard dans l'évangile, ce qui est mode tendance pour utiliser le langage d'aujourd'hui, c'est que Jésus ne dit que ce qu'il signe de sa vie. Si les renards ont des terriers, les oiseaux du ciel des nids, Jésus lui, l'incréé, de riche qu'il était, n'a pas d'endroit au reposer sa tête. Jésus nous instruit autant par sa manière de vivre que par sa parole. Cette claire vision de n'avoir rien où reposer sa tête, nous en voyons au quotidien sa portée de dénuement, de dégradant dans ces flots de réfugiés (43 millions selon ONU) que nous présentent nos mass-média. Ils n'ont rien où reposer leur tête...
Avant de nous indiquer ce chemin pour le suivre, Jésus l'a pris le premier. Saint Bernard nous dit qu'il est descendu du ciel, là où ce chemin n'existait pas, pour en faire son compagnon de vie. Cette vie, sur le chemin du dénuement, ne fut pas facile. Elle fut soumise à une contestation permanente et a exigé de Jésus d'expérimenter au quotidien qu'il soit enraciné dans la confiance absolue envers son ABBA, qu'il n'était pas abandonné de son ABBA. Toute l'activité de Jésus se déroule, dit saint Basile, dans l'Esprit du Père.
Cette vie fut aussi la part d'héritage des premiers évangélisateurs dont nous parle Luc dans les Actes. Il faut passer par bien des tribulations (Ac 14, 22).Pour avoir guéri un boiteux - lève-toi (Ac 14, 8-10) - Paul est lapidé. C'est à ce prix que l'évangélisation de l'Église naissante grandit dans le cœur. Au début de l'Église naissante, les Actes parlaient des chrétiens comme les adeptes de la Voie (Ac 9, 2). Dans un livre rafraichissant, le théologien Albert Nolan (Suivre Jésus aujourd'hui, Novalis, 2009) affirme que ceux qui ne sont pas disposés à donner leur vie [à prendre ce chemin] sont déjà morts (p. 87).
Maître, je te suivrai ? Prenons-nous vraiment ce chemin ? Jésus ne nous attire pas en nous offrant un chemin séduisant. Écoutons-le à nouveau nous dire et c'est sa manière de vive : Celui qui ne porte pas sa croix pour marcher derrière moi, n’est pas digne de moi et encore : Celui qui me préfère son père, sa mère, ses frères, ses sœurs et même sa propre vie, n’est pas digne de moi et de nouveau : Celui qui ne renonce pas à tout ce qu’il possède, ne peut être mon disciple. Dit autrement, cela veut dire que celui qui est peureux et panique devant les moindres exigences, qu'il renonce à suivre Jésus.
Dans l'avion qui le conduisait de Rome à Édinbourg le 16 septembre 2010, Benoît XVI, répondant à une question des journalistes qui l'interrogeaient sur ce qui était attirant de l'Église, répondit que chercher à être attirant serait une erreur.
Saintetés, nous ne devons pas seulement rencontrer Jésus, savourer par notre lectio divina sa Parole, nous devons le suivre.L'insécurité, l'inconnu, le dénuement est notre chemin. Ça demande des efforts. Jésus ne nous promet pas une excursion, mais une vie qui a un sens.Un chartreux exprimait que demeurer attaché à Jésus, de le suivre n'était pas du tout un joug léger mais un collier étouffant. Un collier étouffant notre EGO qui cherche à faire de nous le centre du monde et détruit à néant ce chemin d'épanouissement d'une vie donnée, livrée. Le suivre pousse à nous transcender, transcender nos «saintes» volontés, pour franchir beaucoup d'obstacles.
À votre contemplation: nous qui nous déclarons chrétiens, des « saintetés », prenons-nous vraiment Jésus au sérieux ? N'avons-nous pas plutôt de bonnes excuses - l'âge, santé déficiente, style de vie confortable, etc. - pour ne pas signer de nos vies un tel chemin dont se revendiquent toutes les spiritualités, quelles soient chrétiennes, bouddhistes, hindouistes, musulmanes ?
Entendons Jésus nous dire tout au long de cette eucharistie : non, je ne détruirai pas cette ville (Gn 18, 32), je ne manifesterai pas ma colère, même s'il n'y a moins que de dix personnes prêtes à me suivre. Veillons à laisser Jésus le privilège de faire quelque chose de beau de nos vies avec le rien que nous sommes. AMEN.