2008-A-Lc 17,26-36- Vendredi 32e semaine ordinaire- on mangeait, on buvait
Année A : Vendredi 32e semaine ordinaire (Litao32v.08)
Lc 17,26-36 : on mangeait, on buvait
Deux paysages s’offrent à nous dans cette lecture de Luc : celui de l’éphémère, de la recherche immédiate de la réussite, du plaisir caractérisé par le « manger, boire, acheter, planter, bâtir », par la destruction de Sodome – à noter que l’Évangile ne condamne pas cette manière de vivre - et l’autre, en filigrane, qui laisse apparaître notre destinée commune. Deux paysages, deux manières de bâtir sa vie : sur le sable ou sur le roc. Consommer pour consommer, posséder pour posséder ou concevoir notre vie comme un chemin vers une autre vie. St Jean affirmait, dans la 1re lecture, que «celui qui reste attaché à l’enseignement [de Dieu], celui-là trouve le Père et le Fils». Toute cette page de Luc confirme en filigrane que « nous irons dans la maison du Seigneur » (Ps121, 4). Augustin ajoute avec beaucoup de clairvoyance : «À nous de voir si nous y allons».
Quelle sagesse il y a à découvrir – et certains ne découvrent pas cela – que « nous nous attachons aux convoitises, que nous soupirons de désirs terrestres » (Saint Colomban). Quel discernement il y a à entrevoir que bâtir sur l’avoir - nous le voyons présentement avec les faillites de banques, l’effondrement des marchés- bâtir sur les choses matérielles, visibles, tangibles, sur une carrière rentable, c’est investir dans le sable. L’éphémère occupe beaucoup de place dans nos vies, dans nos préoccupations.
La Bonne Nouvelle que se tisse en filigrane dans cette page devrait nous ternir éveillés : c’est celle de l’acclamation tantôt : « votre délivrance approche». Nous avons un avenir de gloire. Dans son homélie du jour des défunts (2008), Benoît XV1 nous posait cette question : « La foi chrétienne est-elle pour nous aujourd’hui une espérance qui transforme nos manières de vivre ? » Il ajoutait : « notre époque désire-t-elle encore la vie éternelle ou peut-être que notre existence terrestre est devenue notre seul et unique horizon? »
Cette Bonne Nouvelle, que nous vivons « dans l’ombre de la foi » (s. Bernard), « que je n’estime pas avoir saisi » (Ph3, 13), cette grande jubilation que nous pouvons et que nous sommes les seuls à apporter à notre monde, cette grande jubilation qui repose sur chacun d’entre nous et que nous ne pouvons pas déléguer à d’autres, y croyons-nous vraiment ? Elle s’appuie sur le roc de notre foi en la Parole.
Saintes femmes, « le ciel et la terre passeront, mais mes paroles ne passeront point » (PS 118). Ce ne sont pas nos pieds, mais nos cœurs qui nous y portent. Ce sont nos cœurs qui s’ouvrent « à ce qui n’est pas un nouveau commandement, c’est celui que nous avions dès les débuts » (1re lecture). Nous marchons vers une vie de bonheur. Nous sommes destinés à une vie heureuse. Rien n’est plus ancré en nous que cette recherche du bonheur, que le désir de vivre dans le bonheur. Croyons-nous vraiment qu’un bonheur nous attend ?
À votre contemplation : un paradis de joie est notre avenir. Ce paradis n’appartient pas à « la géographie de l’espace mais à la géographie du cœur » (Benoît XV1, message de Noël 2007). Jésus ne se lasse pas de nous parler de ce Royaume. Sa manière de parler, sa « grammaire » (Jean Grosjean) nous dit que quelque chose de grand s’ouvre à nous. « Dieu nous a créés pour une existence impérissable, il a fait de nous une image de ce qu’il est en lui-même ». Comme l’exprime un mystique de l’Islam « nous sommes en pèlerinage vers l’Ami qui demeure en nous ». Jésus, maintenant, nous introduit dans le «cellier» de son eucharistie où coulent le lait et le miel. AMEN.