2009 -B- Jn 12, 22-28- Commémoration des défunts -
Année B : Lundi 31e semaine ordinaire
Jn 12, 24-28 Commémoration des défunts
HOMÉLIE :
Nous sommes les disciples de Quelqu’un qui nous a appris à regarder la mort en face. Les disciples de Quelqu’un qui nous ouvre sur un grand Mystère : nous sommes programmés pour vivre. Aujourd’hui, approcher ce mystère de la mort avec sagesse demande d’entrer dans le secret de la miséricorde de Dieu, de ce Dieu venu nous offrir non une réponse mais nous ouvrir à une espérance : celle du grain de blé qui enfoui dans la terre, se métamorphose en pousses de vie.
Cette espérance là, qui n’est pas une espérance à rabais, se trouve en filigrane dans toute l’Écriture. Un jour viendra où le Seigneur, Dieu de l’univers, préparera pour tous les peuples un festin sur la montagne. Il détruira la mort pour toujours (Isaïe 25,6a). Dieu a créé l’homme pour une existence impérissable, il a fait de lui une image de ce qu’il est en lui-même (Livre Sagesse). Dans mes deux lettres, je fais appel à vos souvenirs pour stimuler en vous la juste manière de penser (2 Pi 3, 1) … le jour du Seigneur viendra… nous attentons des cieux nouveaux et une terre nouvelle (v.13)… ne vous laissez pas arracher à cette assurance (v.17).
Des mots d’hier, des mots Parole de Dieu pour aujourd’hui. Des mots que Benoît XV1 a reformulés par une question dans son encyclique sur l’espérance. Notre foi chrétienne est-elle encore aujourd’hui une espérance qui transforme et soutient nos vies ? En faisant mémoire aujourd’hui de nos défunts, qui nous ont précédés dans le signe de la foi et reposent dans le sommeil de la paix (Prière eucharistique 1), nous ne pouvons éviter cette question : désirons-nous encore la vie éternelle ou bien notre existence terrestre est-elle notre seul horizon ?
Aujourd’hui et je cite Kierkegaard l’au-delà est devenu une plaisanterie, une exigence tellement incertaine que l’on se divertit même à la pensée qu’à une époque cette idée transformait la vie humaine entière.
Toute la prédication de Paul résonne de cette certitude : nous sommes ses héritiers… pour être avec lui dans la gloire (Rm8, 17). Saint Luc ajoute : des héritiers de la résurrection. Il faut ruminer ces mots d’un hymne liturgique arménien du 10e siècle : toi qui fis mourir la mort, tu nous relevas par ta Résurrection. Mais Jésus, nous le croyons, est mort, il est ressuscité, de même ceux qui se sont endormis en Jésus, Dieu les emmènera avec lui (1 Thess. 4, 13-14). L’hymne de la liturgie des premières Vêpres de la veille de Noël chante Aujourd'hui dans notre mort a paru la Vie. Aujourd'hui dans notre monde le Verbe est né. Dieu nous a élus en lui, dès avant la création, pour être saints et immaculés en sa présence. Ces mots de foi laissent voir qu’une proximité nouvelle avec Jésus, qu’un face à face qui est autre chose qu’un affrontement, nous attend.
S’il y a urgence aujourd’hui, c’est bien d’évangéliser la mort qui s’intéresse à nous (Leclerc Félix). Même si au plus intime de toutes les cultures, il y a cette certitude que la mort n’est jamais sans lendemain, notre culture d’ici tait la mort. Le nouveau langage parle d’un direct. Pourtant, et c’est paradoxale, la mort nous donne la clé de toute existence humaine, sa direction. Question de vie ou de mort que cette fête ?
Pour bien faire comprendre cela, Jésus nous offre une image très forte, très parlante, celle du grain de blé qui enfoui dans la terre rapporte beaucoup de fruit. En méditant cette parole, Thérèse d’Avila s’est exclamé O mort, je ne sais comment on peut te redouter, car en toi est la vie (exclamations).
En ces jours des morts, l’Église nous redit avec force cette triple vérité : Il faut mourir pour vivre à une autre vie, mourir pour voir la vraie lumière, mourir pour aimer. J’en conviens, ce langage est fou. Il confond la sagesse du monde. Nous avons la possibilité de dire : ma vie nul ne l’a prend, c’est moi qui la donne (Jn 10.18).
Chaque fois que nous célébrons l'eucharistie, nous faisons mémoire dans les mots d’un enfant de 7 ans qui questionné sur le sens de la mort, a donné cette réponse qui dit tout le sens, tout le mystère de l’eucharistie, celui de nos vies aussi : La mort, c’est la vie que l’on donne après avoir tout donné.
Une eucharistie pour nous redire ces mots du psaume : J’ai demandé une chose au Seigneur, la seule que je cherche : Habiter la maison du Seigneur tous les jours de ma vie. Telle est notre prière ! AMEN