Année A : samedi de la 16e semaine ordinaire (litao16s.20)
Mt 20, 20-28 ; 2 Co 4, 7-15 : apôtres au vase d’argile.
Quand la liturgie invite à faire mémoire d’un apôtre, un apaisement surgit en moi: ces hommes sont vulnérables et sont loin d’être irréprochables. Leur trésor, a dit Paul tantôt, est de s’accepter comme des vases d’argiles. En eux cohabitent de solides certitudes avec des zones de grande fragilisation qui n’épargnent aucun être humain. Paul affirme que sa force est sa faiblesse (2 Co 12, 10). Un homme est bien fort quand il s’avoue sa faiblesse (Honoré de Balzac). La petite Thérèse ne craint pas de dire que se décourager [de sa faiblesse] est un signe d’orgueil.
Bien vivre avec nos vases d’argiles. Qui n’éprouve pas une petite gêne durant la coulpe d’avouer tel ou tel manquement, telle ou telle faille ? Qui n’essaie pas de blanchir un peu l’argile ? Nous avons tellement été éduqués à la performance qu’une faille est inacceptable et occasionne un malaise. Dieu n’exige pas de nous des performances. Il espère notre fidélité à faire peu, parfois trop peu ; c’est ce que nous pouvons lui offrir. L’union à Dieu n’est pas moindre quand on est faible que lorsqu’on est fort. N’a-t-il pas demandé à l’étonnement de Marguerite Marie tu ne m’as pas encore tout donné. N’ayons pas honte de laisser Jésus nous sauver de nous-mêmes.
Les évangélistes ne craignent pas de nous présenter les moments difficiles, et même conflictuels que les apôtres ont traversés. Ils ne décorent pas ni n’embellissent les évènements. Ils dépeignent même les moins beaux et nous présentent la vie telle qu’elle est. Ils n’ont pas voulu cacher ni excuser leurs défauts, n’ont pas hésité à montrer que leur chef de file, Pierre, n’est resté près de Jésus durant sa passion que pour le trahir. Jean Chrysostome parle du choix des apôtres comme un mystère.
Le passage entendu (celui où la femme de Zébédée vient recommander ses fils Jacques et Jean à Jésus : ordonne, lui dit-elle, que, dans ton Royaume, mes deux fils, que voici, siègent, l’un à ta droite et l’autre à ta gauche (Mt 20, 21) montre bien que le message de Jésus ne passe pas bien. Des rivalités existent. La tension était d’autant plus forte pour se faire valoir que Jésus, par trois fois, leur avait annoncé sa passion prochaine. La succession est ouverte : qui donc est le plus grand ? (Mt 18, 1).
En appelant des incompétents à communier à sa vie, à vivre sa pâque, Jésus prend l’engagement d’accepter leur faille. Je serai avec vous. Il s’engage à les relever s’ils tombent, à ne pas les rejeter s’ils rivalisent entre eux. Il leur assure son soutien et dit bien vivre avec cette situation. Bref, avoir un tel employeur encourage à accepter la «job», à l’annoncer quand on l’a tatoué dans notre peau, nos mains, nos têtes.
Il ne suffit pas de marcher avec Jésus, de vivre sa pâque, de communier à sa pâque. Il faut aussi vivre la pâque des autres, marcher au pas de ceux qui sont faibles, qui marchent lentement; ne pas les devancer et désirer une place d’honneur comme le souhaitait la mère des disciples, marcher au même pas, au même rythme, les accompagner comme Jésus le fait pour nous.
Apôtres ou disciples-missionnaires, nous avons en commun la même carte d’identité, le même nom de famille : monsieur, madame, sœur vulnérabilité. Cela signifie que nous avons besoin de soins. En acceptant d’être d’argile, vulnérable, fragile, nous sommes assurés de la puissance extraordinaire de Dieu.
Apôtres et chrétiens de toutes les époques, nous sommes tous égaux. Égaux dans nos vulnérabilités et égaux dans la joie de faire quelque chose pour les autres, égaux d’offrir aux autres notre joie de connaître Jésus. Nous sommes égaux aussi en partageant quelque chose de notre foi et en marchant ensemble, non séparés des autres, non pas plus haut que les autres aussi.
Merci, Jésus, pour la foi que tu nous donnes. C’est pourquoi nous parlons. Merci de nous porter dans tes bras, dans ton cœur quand nos défaillances font mal à ton Église. AMEN.
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