2008-A-Lc 14, 1-6 Vendredi 30e semaine ordinaire -repas chez un pharisien
Année A : Vendredi de la 30e semaine ordinaire (litao30v.08)
Lc 14, 1-6 : repas chez un pharisien
En accueillant Benoît XV1, à l’Élysée, le président Sarkozy déclarait que la dignité humaine s’est imposée comme une valeur universelle. « A l’heure, dit-il, où ressurgissent tant de fanatismes, à l’heure où les égoïsmes les plus durs menacent les relations entre les nations et au sein des nations, cette option absolue pour la dignité humaine (que vous représentez très saint Père), et son ancrage dans la raison doivent être tenus pour un trésor des plus précieux ».
Ce trésor - la dignité humaine - n’est pas seulement trésor pour l’humanité. Il est aussi trésor d’Évangile. Le pharisien, chez qui Jésus prenait son repas un jour du sabbat, a-t-il vraiment compris que le geste de Jésus soulageant un homme atteint d’hydropisie (maladie qui fait que le corps secrète une odeur désagréable), était un geste trésor d’Évangile? Et nous qui venons d’écouter cette Parole de Dieu, avons-nous saisi que cette page nous concerne? Elle nous invite à une métamorphose sans précédent dans l’histoire de la foi en un Dieu unique.
En fin observateur de la société d’alors qui focalise tout autour d’une pratique extérieur du sabbat, aux fins observateurs de notre société d’aujourd’hui qui structurent tout leur raisonnement à partir d’une logique insatiable de la consommation, Jésus, par sa question, « est-il permis » ouvre son hôte, nous ouvre les yeux sur l’importance de la dignité humaine. C’est le trésor des trésors, la priorité des priorités. C’est en pensant à la dignité de l’humain que Jésus a agi ainsi le jour du sabbat. J’exprimais lundi dernier qu’il nous fallait comme Jésus être « tout œil ». Ce matin j’ajoute qu’il nous faut être « tout oreille » aux souffrances des autres.
Question : comment reproduire ce “geste patrimoine” de Jésus? Ce geste architectural de notre foi? La réponse est simple, peut-être trop simple : renaître à l’humain, aux droits humains. Jésus, de passage chez un notable pour un repas, en profite pour lancer un appel à ré-évangéliser le gros bon sens. Simple?
Comme l’exprimait si éloquemment Benoît XV1 dans sa rencontre avec les notables juifs lors de son voyage à Paris, qui citait le Talmud (58b), le gros bon sens c’est que le « le sabbat vous est donné, mais vous n’êtes pas donné au sabbat ». Le gros bon sens, c’est d’abreuver même un jour de sabbat, les animaux. Le gros bon sens : nous sommes « donnés », « voués » à faire vivre.
Loin d’être une idéologie abstraite, un système qui gère nos manières de nous comporter entre nous ou un code de bonne conduite, la révélation, la Bonne nouvelle – faut-il l’observer toujours Bonne nouvelle -, c’est que le Père en nous envoyant son Fils « né d’une femme » (Gal 4, 4), est venu nous sauver d’une conduite à deux faces : l’une pour le dimanche et l’autre pour les six autres jours de la semaine.
Alors que le pharisien avait soif d’être bien vu, d’être «estimé» de Jésus, il se voit inviter à opérer en lui un miracle, une guérison : tu vois, semble lui dire Jésus, cet homme atteint d’hydropisie; lui aussi, comme toi, il a soif d’être estimé, lui aussi a soif d’être quelqu’un. Et ce trésor là, «être quelqu’un», aider à «être quelqu’un», il faut l’offrir tous les jours de la semaine, incluant le sabbat. Ce trésor-là, Jésus précise, dans le texte qui suit notre évangile ce matin, que nous risquons de le perdre quand nous cherchons la place d’honneur à un repas ou que nous recherchons toute la place. « Si quelqu’un est plus digne que toi, le maître te dira… »
À votre contemplation : paraphrasant Paul dans la 1re lecture, « je rends grâce à Dieu quand je fais mention de vous à cause de ce que vous faîtes pour l’Évangile ». Ici, vous n’écoutez pas la Parole de Dieu pour y demeurer par la suite, indifférent. Ici, la Parole de Dieu, celle qui invite ce matin à donner de la dignité, n’est pas seulement une vue de l’esprit. « Puisque Dieu a si bien commencé en vous, chez vous son travail », « puisque vous n’oubliez aucun de ses bienfaits » (Acc), pour vous maintenant, je deviens Pain de Vie. AMEN.