Isaïe 61, 1-3a; 6a; 8b-9 Apocalypse 1, 5-8 Luc 4, 16-21
« Le Seigneur m’a envoyé porter la Bonne Nouvelle aux pauvres ». Cette parole de l’Écriture que vous venez d’entendre, c’est aujourd’hui qu’elle s’accomplit (Luc 4, 21). Aujourd’hui, comme au temps de la prédication de Jésus, l’Esprit du Seigneur envoie son Serviteur porter la Bonne Nouvelle aux pauvres.
La prophétie d’Isaïe s’est accomplie dans la personne de Jésus de Nazareth. Aujourd’hui, elle s’accomplit dans la personne des disciples du Christ que nous sommes. À nous, il donne son Esprit afin que nous poursuivions sa mission aujourd’hui, en ce 21e siècle.
Comme le souligne le pape François dans son exhortation La joie de l’Évangile, Jésus constitue ses disciples en mission. Il fait d’eux des disciples missionnaires.
Le 4 mars dernier, lors d’une audience aux membres de l’Académie pontificale pour la vie, je remerciais le pape François pour le Jubilé extraordinaire sur la Miséricorde qui, c’est ce que je lui disais, produisait déjà de bons fruits et des œuvres de miséricorde. Et le pape François de me dire : « Bravo mais rischiate, rischiate, rischiate! » Par trois fois, il m’a dit : Risquez, risquez, risquez…
À nous prêtres, diacres, agentes et agents de pastorale, intervenants, bénévoles, religieux, religieuses, laïcs engagés, le Seigneur nous lance un appel, celui de risquer.
Risquons la foi :
L’épreuve de la foi que nous allons traverser en suivant le Christ pas à pas pendant ces trois jours du Triduum pascal, c’est l’épreuve quotidienne de la vie des disciples qui essaient de Le suivre et de vivre de sa Parole. C’est l’épreuve et le combat des chrétiens de tous les temps et de tous les lieux.
Aujourd’hui, de nombreux frères et sœurs au Moyen-Orient sont persécutés à cause de leur foi. Ici au pays, nous faisons face non seulement à un effacement culturel des références chrétiennes, fruit d’un oubli, d’une ignorance ou d’une indifférence, mais aussi d’une action militante qui cherche à évacuer le catholicisme, la religion chrétienne de l’espace public. Plus que jamais, il ne faut pas avoir peur d’afficher les couleurs de notre foi, de notre attachement au Christ, et l’attestation de notre foi et de nos valeurs se fera par l’exemple vécu. Non par une lutte idéologique ou politique, mais par la conversion permanente pour que nos pratiques soient conformes à ce que nous disons, pour que nous soyons nous-mêmes évangélisés par la Bonne Nouvelle dont nous sommes témoins.
Dans cette société sécularisée qui est la nôtre, risquons l’annonce de la Bonne Nouvelle. Et dans cette annonce qui est réellement œuvre d’Église, nous devons pouvoir nous appuyer les uns sur les autres et nous soutenir pour surmonter nos appréhensions, nos peurs, nos faiblesses…
Nous devons pouvoir compter les uns sur les autres pour garder le zèle et la joie de crier la Bonne Nouvelle au monde.
Comme le dit le pape François : « Ne nous laissons pas voler la joie de l’évangélisation, la joie de l’espérance. Laissons le Seigneur nous parfumer avec l’huile de joie. ».
Risquons la compassion, la miséricorde :
« Un bon prêtre doit savoir s’émouvoir de la vie des gens », disait le pape François aux prêtres de Rome au début du mois de mars. Et cela s’applique à chacun et chacune d’entre nous. Dieu a envoyé son Fils pour guérir l’humanité, pour la régénérer… Jésus est le visage de la miséricorde du Père et à la suite du Christ, nous sommes appelés à être visage de la tendresse et de la compassion de Dieu pour l’humanité.
Jésus est envoyé par Dieu pour se mettre en chacun de nous, pour nous libérer, pour guérir les cœurs brisés, pour alléger nos fardeaux, pour soigner le cœur humain et le guérir de ses maux, de ses péchés. Pour cela, il nous faut, prêtres et ministres ordonnés, de façon toute particulière, nous émouvoir, nous engager dans la vie des gens, nous impliquer dans leurs problèmes.
Un cœur qui s’émeut, c’est un cœur qui souffre avec et pour les personnes. La souffrance pastorale est une forme de miséricorde. À l’image du Bon Berger, le prêtre est un homme de miséricorde et de compassion, proche de son peuple et serviteur de tous et toutes : comme pasteurs, nous devons donner beaucoup de miséricorde.
Dans toute l’Église, c’est le Jubilé de la Miséricorde. C’est une consigne donnée à tout le peuple de Dieu : « Soyez miséricordieux comme le Père ». C’est à nous, ministres de l’Église, de garder ce message vivant, surtout dans nos prédications, dans nos gestes, dans les signes sacramentaux, dans les choix pastoraux (comme le choix de redonner la priorité au sacrement de la réconciliation), dans les œuvres de miséricorde.
Avoir un cœur qui s’émeut, c’est accueillir et écouter celui et celle qui est blessé dans sa vie, c’est soigner les blessures. Il y a tant de gens blessés par les problèmes matériels, par les scandales, par les séductions et illusions du monde. Nous les prêtres, nous devons être proches de ces gens, auprès d’eux pour leur témoigner la miséricorde de Dieu. Un cœur qui s’émeut est un cœur touché par la grâce, la bonté de Dieu : le curé d’Ars a touché le cœur des gens parce que lui-même avait été touché au cœur.
Connaissons-nous les blessures de nos paroissiens et paroissiennes? Sommes-nous proches d’eux? Combien, parmi nous, pleurent devant la souffrance d’un enfant, devant la destruction d’une famille, devant tant de personnes qui souffrent d’être mal-aimées, de ne pas être aimées? Avons-nous perdu nos larmes? Sommes-nous capables, comme le Bon Samaritain, de nous arrêter devant nos frères blessés et de les accompagner? Combien de fois il nous arrive de passer outre, de les éviter en trouvant des justifications, des excuses?
Risquons la Mission :
Jésus est envoyé. Nous sommes envoyés. Les prêtres, collaborateurs des évêques, sont envoyés. Les diacres, les agentes et agents de pastorale, les intervenants, bénévoles, laïcs et religieux, nous sommes tous envoyés. Osons le virage missionnaire, osons inventer des voies nouvelles pour annoncer le Christ, sortons de nos habitudes et de nos façons de faire pour rejoindre les personnes qui ont pris des distances face à l’Église et à nos communautés, et qui ont soif de bonheur et qui veulent un sens à leur vie.
Membres du Peuple de Dieu, nous sommes tous sollicités pour assurer la mission du Christ avec confiance. Mais certains sont appelés à un service spécial. Ce soir, je vous invite, vous tous ici réunis, à prier pour les prêtres que Dieu nous a donnés pour nous conduire, nous enseigner et nous sanctifier.
Pour oser, risquer, tournons-nous vers Dieu qui, en Jésus, nous donne sa force qui est « avec nous jusqu’à la fin des temps ». La présence du Christ est la force du combattant de la foi. Elle nous est manifestée sacramentellement par les huiles que je vais bénir et consacrer comme signes de la force de sa mort et de sa résurrection, appliquées à toutes les situations de notre vie.
L’huile des catéchumènes est le signe de la force donnée dans le combat de la conversion et du passage à une nouvelle vie. L’huile des malades, pour ceux qui sont confrontés à l’épreuve de la maladie ou aux infirmités de la vieillesse, donne la force qu’il faut pour affronter la douleur et la mort avec sérénité et confiance, comme une offrande d’amour qui donne sens à ce qu’ils vivent.
Le saint Chrême, signe du don de l’Esprit Saint, consacre les prêtres et tous les disciples du Christ baptisés et confirmés.
* * * * * * * * * * *
Dear faithful in Christ, as baptized, as lay ministers, as deacons, pastoral agents or priests, we are consecrated, chosen by the Lord to proclaim the Good News, to be witness of the Gospel of life and mercy. We are called to be missionary disciples, to go out; there, in order to experience our own anointing, its power, its strength, its redemptive efficacy, to the outskirts where there is suffering, bloodshed, blindness, hatred, misery.
Sometimes we hear people saying to others, not always in a kind way, “Get a life”. There may be some truth in this advice. We can feel weary, discouraged and sad when confronted to hatred and violence as expressed in the recent terrorist attacks in Brussels. Easter joy and the compassionate presence of the Risen Lord can seem far away. We need to get a life : it means to find our meaning and our “center” in God’s great love and peace. To get a life is to perceive Jesus’ presence in the midst of trials and darkness.
As we entering the celebration of Holy Days commemorating the Passion, the Death and the Resurrection of Christ, let us turn towards and look at Jesus, the Faithful witness, the Anointed. Our look, our vision, will be one of hope because from Jesus suffering comes our strength, from his death our life.
May the Spirit renew our commitment to follow Christ and to spread the Gospel of life and Mercy.
* * * * * * * * * *
Ce soir, chers frères prêtres, je tiens à vous exprimer ma fidèle affection et ma reconnaissance pour votre disponibilité à répondre généreusement aux responsabilités qui vous sont confiées, et pour votre dévouement constant au service du peuple de Dieu dont vous avez la charge.
Grâce à vous, et dans un contexte de temps difficiles, notre Église reste vivante et dynamique. À vous, diacres permanents, à vos épouses et vos familles, je veux redire ma reconnaissance pour votre engagement dans la mission commune au service de l’Évangile. À vous aussi, agentes et agents de pastorale, intervenants et intervenantes, catéchètes bénévoles, religieux et religieuses, laïcs engagés, mille mercis pour votre précieuse collaboration et votre témoignage de foi, spécialement auprès des jeunes.
À vous tous présents et aux communautés que vous représentez, que ce Triduum pascal vous donne l’occasion de marcher dans les pas du Ressuscité, de passer avec Lui des ténèbres à la lumière, de la mort à la Vie, de la tristesse à l’espérance et à la joie.
Que le Ressuscité vous garde actifs à sa suite et engagés à être des témoins de la miséricorde et de la tendresse de Dieu!
AMEN