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La nouvelle évangélisation: une affaire de famille!

Date: 
Mercredi, 13 novembre, 2013 - 09:15

Michèle Boulva, directrice de l’Organisme pour la Vie et la Famille (OCVF), était de passage à Salaberry-de-Valleyfield le mercredi 6 novembre dernier, pour animer une journée de réflexion avec les agents-es de pastorale, les intervenantes, les diacres permanents, les prêtres et des bénévoles en paroisse.

 

La nouvelle évangélisation : une affaire de famille! Voilà : le thème donnait le ton aux présentations et échanges afin de reconnaître la mission spéciale de l’annonce et du témoignage de notre foi chrétienne au cœur des cellules de base indispensables et variées que sont les familles actuelles. 

 

Mgr Noël Simard, notre évêque a lancé la journée avec une réflexion bien réaliste du portrait des familles québécoises que nous côtoyons (voir texte ci-joint). Mme Boulva a par la suite revisité, dans sa beauté tout autant que dans sa fragilité, le contenu de la foi que nous avons à transmettre d’une façon nouvelle, c’est-à-dire avec enthousiasme, zèle et audace. Avec des mots nouveaux, des méthodes d’aujourd’hui qui redisent combien Dieu est vivant – même si parfois oublié – et que son amour nous rejoint dans notre tissu quotidien. Il est là dans nos familles et il a un amour à offrir qui peut nous fortifier et nous ouvrir à une vie belle et signifiante. La documentation abondante de l’OCVF explore dans toutes leurs dimensions ces pistes de bonheur pour les familles.

 

Plusieurs échanges ont permis d’approfondir nos pratiques pastorales touchant les familles, dont la première approche doit être celle de la miséricorde.

 

Bref, cette journée nous a fait plonger davantage dans l’actualité de notre priorité pastorale : la famille et la nouvelle évangélisation. Elle nous a stimulés à porter dans la prière et soutenir concrètement les familles, pour que chaque maison soit lieu de communion et d’amour.

 

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ALLOCUTION DE MGR NOËL SIMARD

LORS DE CETTE JOURNÉE DIOCÉSAINE DE FORMATION

LA NOUVELLE ÉVANGÉLISATION : UNE AFFAIRE DE FAMILLE

AVEC MICHÈLE BOULVA DE L’OCVF - 6 NOVEMBRE 2013

 

LA FAMILLE, DESTINATAIRE DE LA NOUVELLE ÉVANGÉLISATION

Pour bien remplir notre mission évangélisatrice, il faut bien connaître la réalité à`évangéliser. Il faut être présent à notre présent.. Nous sommes confrontés à une sorte de dilemme à propos de la famille. Comme pasteurs, agents et agentes de pastorale, pouvons-nous croire en un modèle de famille et en faire la promotion sans risquer de juger et de condamner ceux qui n’y adhèrent pas? Pouvons-nous accueillir toute la diversité des expériences de vie familiale sans renoncer à nos propres convictions? Comment discerner un chemin pastoral dynamique et respectueux dans les temps que nous vivons?

 

Cette présentation s’inspire des articles suivants :

PIERRON, Jean-Philippe : « Les familles dans la modernité tardive », Colloque Famille 2011,  Familles et société : quels choix pour demain?  1er et 2 octobre 2011. Cité internationale universitaire de Paris. Texte du Conseil Famille et Société, http : //www.eglise.catholique.fr

VINGT-TROIS, André Cardinal : « La famille, nous y croyons », Colloque Famille 2011,  Familles et société : quels choix pour demain?  1er et 2 octobre 2011. Cité internationale universitaire de Paris. Texte du Conseil Famille et Société, http :// www.eglise.catholique.fr

 

La famille aujourd’hui, ou le paradoxe de la situation de la famille aujourd’hui 

En matière d’évolution de la famille, ou des familles, il faut prendre acte de l’évolution de la relation entre l’Église et la famille. Il nous faut prendre acte des faits, qui ne peuvent être niés :

Ø  L’instabilité dans la famille;

Ø  L’instabilité du mariage, la forte proportion des divorces;

Ø  Les repères d’identification de la famille qui sont brouillés;

Ø  La difficulté même de définir la famille : Le mot « famille » n’évoque plus une réalité communément reconnue, si bien qu’aussitôt qu’on l’emploie, on doit le qualifier par un adjectif : famille classique, nucléaire, monoparentale, éclatée ou explosée, famille recomposée, famille homoparentale, etc.

 

Paradoxalement, les sondages démontrent que les gens demeurent attachés à l’image de la famille stable. La famille est donc l’objet d’attentes contradictoires. Elle demeure une valeur refuge : on lui demande de procurer ce qu’on ne trouve pas dans les autres sphères de la vie sociale. On veut qu’elle offre un espace privé de sécurité et de détente, parallèlement à une société contraignante. C’est pourquoi chez soi, on n’admet pas de règles, pas de normes sociales. On veut qu’elle soit un espace de stabilité et de confiance, à la différence de la vie professionnelle, marqué aujourd’hui par l’instabilité et la précarité. On veut qu’elle soit un lieu de gratification affective, alors que les autres relations sociales sont vécues sous le mode de l’indifférence, voire de l’exclusion, du mépris ou même de la violence.

 

La justification sociale des modèles alternatifs de famille advient, entre autres, par l’occultation médiatique des mariages stables : on gonfle le taux de divorces, on parle davantage des conflits familiaux. Or, deux couples sur trois ne se séparent pas, et on ne s’intéresse pas aux moyens qu’ils prennent ou qu’ils se donnent pour vivre ensemble, etc.  On évite de chercher à établir par des statistiques le lien entre l’échec scolaire ou la primo-délinquance et le fait de vivre dans une famille éclatée.

 

Un constat : il existe plusieurs modèles, une variété de familles. On parle du passage de la famille modèle vers la famille module. Un glissement de vocabulaire nous fait passer de la question de la famille vers celle de la parentalité. E d’autres mots, c’est un glissement d’une approche substantielle vers une approche en termes de réseaux, d’une conception de l’identité, non pas en termes de référence à une essence (nature), mais en référence à un certain nombre de relations.

 

Être une famille, ou faire famille

« Faire famille », cette locution exprime l’idée que la famille est moins pensée comme une essence anhistorique (un donné tout fait et immuable), qu’une institution au cœur de laquelle chacun apprend progressivement à se percevoir et à s’y reconnaître un lignage.

 

« Faire famille » sous-entend que la famille est pensée moins dans la lignée des racines que dans la catégorie des réseaux; moins comme substance que comme un itinéraire, un parcours…Nous passons donc d’une conception de la famille comme une unité familiale intangible (conception anhistorique et a-géographique), à une conception d’une unité vécue sur la base d’une expression relationnelle.

 

Certes la famille ne peut pas faire l’économie d’être une histoire. Mais cette transformation de la famille pose question et en effraie plusieurs. Les recompositions ne seraient-elles que des décompositions, des dé-liaisons généralisées qui finissent en expériences décevantes? Démariages, désordres amoureux, décomposition…Peut-on voir le présent autrement? Il faut déchiffrer les signes des temps.

 

L’expression « faire famille » n’exprime-t-elle pas l’idée d’un « être-ensemble » avec ces autres que nous disons être les nôtres dans le cadre d’un parcours de reconnaissance? Peut-être est-ce l’occasion d’expliquer sa destination, son projet dans le contexte de notre temps. Bien sûr, la famille est le cadre qui permet de se situer comme homme et femme, dans un lignage. Pensons au prologue de l’Évangile de Mathieu, qui raconte l’incarnation de Jésus en relatant comment il prend sa place dans l’histoire. Comme être humain, Jésus le fait sur le mode d’une inscription généalogique, d’une hospitalité généalogique. La famille devient le lieu où il est possible de célébrer, de vivre un essentiel auquel elle nous lie, le lien originaire avec la vie au-devant de nous, la question de l’originaire et de l’ancestral, et en même temps l’essentiel de l’au-delà de nous, les espérances et l’attente de ce qui est à venir dans les générations qui viennent.

 

La famille est à la fois une origine et un horizon dont elle apprend à déchiffre le sens dans une histoire. On y fait l’apprentissage par lequel d’autres deviennent les nôtres, dans la conjugalité, la généalogie et la fraternité.

 

Influences de la modernité tardive sur la famille

1)      L’individualisme démocratique :

La reconnaissance de la valeur insubstituable des individus  a eu pour effet une critique de la figure du paternalisme et de toute forme abusive d’autorité entendue comme abus de pouvoir. Le passage de la famille à la parentalité a comme conséquence qu’il est difficile de déterminer ce qui rend légitime une forme d’ordre familial. La démocratie domestique met en cause ou questionne les fonctions et le sens de la famille, à savoir : les fonctions de transmission, de socialisation, de reconnaissance affective, de responsabilité éducative et le sens qui consiste à fournir la narration d’une histoire et la façon de nous rattacher à l’humanité.

 

2)      La sécularisation :

La sécularisation et le pluralisme des mœurs familiales

 

3)      L’accélération :

L’accélération et la vitesse (pas nécessairement le progrès) de la vie entraîne l’émancipation des idéaux qui ont traversé les siècles. La communication n’est pas nécessairement la transmission (technologies, nouveaux médias). Comment inventer des ilots de décélération?

 

 

4)      L’influence de la pensée néo-libérale :

La prédominance de la dimension économique sur le social entraîne la logique du profit et l’instrumentalisation de l’humain : « Ce que je veux, quand je le veux, avec qui je veux. » Ces aspects socio-économiques produisent une forme de précarisation et peuvent être le révélateur d’un vaste mouvement qui dépossède la famille de tous ses rôles de transmission, de son capital symbolique, de son savoir-faire. Un exemple de famille vulnérable et précaire est la famille mono-parentale : comment accompagner ces familles fragilisées ou précarisées?

 

5)      La mobilité :

Le brassage des populations dans un pluralisme ethnique et culturel entraîne d’autres manières de faire famille. Comment tenir compte de cette variabilité des familles dans l’espace? Comment maintenir un équilibre entre un universel du fait familial (nature, origine, généalogie) et la prise en compte du familial à déchiffrer dans un contexte de singularité d’une histoire? Comment apprendre à faire famille sans réifier une forme du passé qui l’absolutiserait, ni céder au relativisme des contextes qui dit : « Finalement, tout se vaut ».

 

 

Une question très importante : le lien entre la famille et la foi chrétienne

Enfin, y a-t-il une manière chrétienne de vivre et de célébrer la famille? Y a-t-il une telle chose qu’une famille chrétienne?