2011-A-Jn 6, 37-40 -Commémoration des défunts -un printemps se prépare
Année A : Commémoration des défunts (2011-a)
Jn 6, 37-40 : un printemps se prépare
La nuit n'est jamais complète. Il y a toujours au bout du chagrin une fenêtre ouverte. Une fenêtre éclairée. Il y a toujours un rêve qui veille, un désir à combler, un faim à satisfaire (Paul Éluard). Ces mots d'un poète, les textes que nous venons d'entendre les transforment en mots mystiques : tous ceux que le Père me donne viendront à moi (évangile). Dans notre vie comme dans notre mort, nous appartenons au Seigneur (deuxième lecture). Il ne leur vient pas à l'esprit que Dieu accorde à ses élus grâce et miséricorde (première lecture).
La contemplation des textes de ce matin, leur manducation, devraient nous ravir pour peu que nous sachions par des exercices de réchauffement, comme les athlètes le font chaque jour, en faire des paroles de feu qui nous réchauffent le cœur. En toute vérité toutefois, ce n'est pas nous qui transformons par nos exercices de réchauffement, nos temps d'oraison, ces paroles en paroles de feu, mais c'est plutôt le Feu «dormant» dans ces paroles qui se donne à nous. Je ferai de mes Paroles un feu dans ta bouche (Jér 5, 14).
Paroles de feu : Il rendra nos corps semblables à son corps glorieux (Ph 3, 21) et, ajoute saint Bernard, il emplira d'honneur ce vase (nos corps) si faible aujourd'hui. Mais ce feu ne prend pas si nous n'y mettons pas un peu du nôtre par des exercices de réchauffement. Oui, un jour du temps, le Seigneur élevé aux cieux (Ac 1, 11), reviendra nous prendre avec lui. N'y-a-t-il pas dans ces paroles de quoi nous émerveiller ?
Saintetés, vous me direz sans doute, oui, mais nous émerveiller devant la mort, n'est-ce pas un peu étonnant ? Non si l'émerveillement est une sortie de nous-mêmes, une mort à nous-mêmes pour nous transformer en ce que nous voyons. La plus grande des merveilles, la merveille des merveilles, c'est que nous humains, sommes conviés à laisser briller en nous la lumière sans fin (Ps 26). Il y a du sens à dire que la vie a du sens quand on va vers la Vie. Nous vivrons demain si nous vivons aujourd'hui de cette plénitude du sens de la vie. La vie n'est pas détruite, elle est transformée (préface).
Augustin disait: ne pas mourir c'est impossible, mais bien vivre - donner du sens à notre vie - c'est possible. Maurice Zundel, ce grand «voyant» du siècle dernier, affirmait que le vrai problème n'est pas de savoir si nous vivrons après les morts, mais si nous serons vivants avant la mort.
En célébrant aujourd'hui nos défunts, si nous faisons, je reprends ce que j'exprimais tantôt, des exercices de réchauffement, nous saisirons - le mot n'est pas assez fort je crois -, qu'au commencement ce n'était pas parce qu'il avait besoin de l'homme que Dieu a modelé Adam, mais pour avoir quelqu'un en qui déposer ses bienfaits, sa lumière (saint Irénée de Lyon). L'évangile vient de nous dire : la volonté du Père, c'est que je ne perde aucun de ceux qu'il m'a donnés.
Mais une question surgit, celle que se posait Benoît XVI dans son encyclique sur l'espérance : la foi chrétienne est-elle aussi pour nous une espérance qui transforme et soutient notre vie. Les hommes et les femmes de notre époque désirent-ils encore la vie éternelle (cf. #10)?
Il n'est pas suffisant de croire en cela. Il faut que nous passions cette Parole-feu aux autres. Il faut entre nous, c'est notre tâche de chrétiens, nous passer la Parole. Saint Paul écrivait aux Thessaloniciens : La Parole de Dieu que nous vous faisions entendre, vous l'avez accueillie, non comme une parle d'hommes, mais comme ce qu'elle est vraiment, la Parole de Dieu. Que cette Parole reste active en vous, les croyants (1 Th 2, 13).
Je termine par ces mots du Père Christophe de Tibhirine qui disait peu de temps avant son martyre : je suis ressuscité, je peux mourir. Une eucharistie qui nous prépare à nous voir des invités à une eucharistie sans fin où dans ta demeure nous vivrons près de toi pour toujours. AMEN.