2008 - A- Mtt 3, 13-17 Baptême de Jésus
Année A : baptême du Christ
Mtt 3, 13-17
Benoît XV1 déclarait aux évêques Coréens en visite ad Limina (déc.2007) que « le baptême nous donne accès à la demeurance du Christ en nous. » C’est beaucoup plus qu’un « acte de socialisation dans la communauté (Eglise), plus qu’un rite social de bienvenue (Benoît XVI spes salvi #10). En nous faisant entrer dans cette demeurance de Dieu, ce geste rituel donne de la perspective à nos vies : « les cieux s’ouvrirent ». Oui, nous avons un bel avenir devant nous.
Cette descente de Jésus dans nos eaux usées, polluées nous en fait ressortir « comblés de grâce ». Elle fait reposer sur nous « l’esprit » dont parle la 1ière lecture : « ne pas hausser le ton, ne pas écraser le roseau froissé, ne pas éteindre la mèche qui faiblit ». Aujourd’hui, Jésus vient comme hier, se mouiller dans nos eaux pour les dépolluer. Il vient nous dévêtir du« vieil Adam » pour nous habiller d’un vêtement de gloire.
Quel admirable échange ! Nos odeurs de puanteurs attirent l’odorat raffiné de Jésus pour les transformer « en bonne odeur du Christ (2 Cor.2.15). » « Il faut savoir que Dieu envoie l’odeur de ses onguents, avec laquelle il nous fait courir jusqu’à lui, pour nous offrir ses attouchements divins » (Jean de la Croix vive Flamme, 111,28). En entrant dans les eaux du Jourdain, Jésus, l’offensé, atteste qu’il nous cherche avec plus de foi et d’ardeur que nous le cherchons nous-mêmes. Il vient frapper à notre porte pour solliciter notre permission d’habiter nos coeurs pour y entreprendre lentement notre divinisation. « Ensevelis avec Lui, lors du Baptême, nous sommes aussi ressuscités avec Lui (Col)». « Nous vivons d’une vie nouvelle » (Rm6, 4).
Par son entrée dans les eaux du Jourdain, Dieu, en Jésus, nous montre son humilité sans fond, sa nudité sans honte d’être ce Nouvel Adam venu « nous sortir des bosquets où nous étions terrés pour nous rendre la joie du premier jardin » (Père de l’Orient ancien). Il nous fait passer non pas d’une rive à l’autre mais d’un monde à autre monde. Si seulement nous consentions à nous engager à voir ces « cieux s’ouvrirent ! ». Le Baptême, celui du Christ comme le nôtre, ce sont « les cieux qui s’ouvrent » pour nous faire entrevoir que ce qui est arrivé à Jésus – « celui-ci est mon Fils bien-aimé » – est aussi ce qui nous arrive quand nous sommes baptisés (Jean Chrysostome).
Oui, comme Marie, nous aussi sommes des « comblés de grâce ». Que peut-il y avoir de plus grand que cette plongée de Jésus dans nos eaux souillées qui nous transforme et nous transfigure en icône de « grâce » ? Le baptême comme votre engagement dans l’Institut, atteste que choisir Dieu nous comble à ce point que nous déclarons avec empressement : « Voici ta servante… ». Des mots simples. Des mots de remise de nous-mêmes entre les mains d’un Autre qui nous fait clamer, habité par l’Esprit « que tout se fasse selon Ta Parole ».
C’est fou de la part de Dieu de nous combler de grâce. C’est fou d’avoir été «choisis par lui avant la création du monde, pour être, dans l’amour, saints et irréprochables sous son regard». C’est fou de voir Dieu, le sans péché, plongé dans nos piscines polluées pour nous offrir de bâtir nos vies sur le « roc » et non plus sur du sable mouvant. C’est fou de voir Dieu sortir à la recherche de tous ceux et celles qui traînent, plus ou moins découragés sur les chemins de la vie, car il veut que sa maison soit pleine d’hommes et de femmes libres, dépollués, « comblés de grâce ». Il veut que sa salle nuptiale soit remplie de convives. C’est fou de voir Dieu nous choisir pour « le servir en sa Présence (Pri. euc #2)», pour transfigurer le monde par notre engagement à sa suite. Tout humain qui saisit cela vit « sans crainte » parce que même si les vents sont déchaînés, rien n’abattra cette maison.
Femmes consacrées, qu’avez-vous fait de cet état « comblés de grâce » dont vous avez été doublement gratifiées par votre baptême et par votre engagement dans l’Institut ? Nous nous glorifions de mieux parler du baptême que d’en vivre. Nous ne sommes pas baptisés pour que Dieu soit en nous mais parce que Dieu est en nous. En nous unissant au Christ, nous devenons des « sacrements » (j-P.11) pour l’humanité, « lumière du monde et sel de la terre (Mtt 5,13-16) ». Voila notre profession.
À votre contemplation : le baptême ne nous assure pas une vie paradisiaque sur terre. Notre demeurance en Dieu n’est pas un lieu de tout repos. C’est un combat, une « prise d’assaut de la plus vaste cité de ce monde, nos méchancetés » (Origène 2e siècle) – « renoncez-vous » - dont la victoire nous conduit à une « vie bienheureuse » (Benoît XV1 citant s. Augustin spes salvi #11).