2025-C- samedi de la 5e semaine du CARÊME (litcc05s.25) 12 avril
Jn 11 45-57 : un seul homme doit mourir
À lire ce passage où Jésus affronte ses opposants, une conclusion s’impose : le succès n’est pas le nom de Dieu. Jésus fait face à une vérité implacable. On lui en veut à mort de déranger l’ordre établi, de ne pas respecter le sabbat, de déclarer que Dieu est son Père (Jn 5), d’être un fauteur de trouble, un anticlérical, un marginal même pour sa famille. Il a perdu la tête (Mc3, 20-21).
Ce qui survoltait l’opposition, c’est qu’avec Jésus il n’y a plus les un d’un côté et les autres de l’autre. Il n’y a plus les purs d’un côté et les impurs, tels croyants d’un côté et tels autres de l’autre, les victimes d’un côté et les coupables de l’autre, les pharisiens d’un côté et les publicains de l’autre. Avec lui, il n’y a plus de division. Quand il affirme cela, Jésus se place du côté de ceux qui vont le vendre, le trahir, afin qu’il n’y ait pas de division entre eux et lui. Avec lui chaque personne se sent acceptée, respectée, aimée. Mais cette prise de position de Jésus lui attire beaucoup d’ennemis. Que tous soient un.
Malgré ses efforts à donner de la dignité à tout le monde, à refuser de catégoriser les gens entre bon et mauvais, malgré son humanisme rassurant, Jésus prend conscience qu’un étau se resserre et qui étrangle sa vie. Nous venons d’entendre le récit d’un fiasco total. La réussite de Jésus fut de bien vivre un échec.
Au lieu de sombrer dans la déprime, de se demander à qui bon d’annoncer quelque chose de neuf ou encore de désespérer de ne jamais réussir, Jésus refuse de se laisser abattre. Plutôt que de se sentir victime, il accepte ce qui lui arrive. Il n’ouvre pas la bouche.
Dans les mots d'aujourd'hui, la grande sensibilité de Jésus, sa compassion, lui a fait connaître tous les malheurs. Il n'en finit pas de souffrir, de pressentir qu'on ne Le connaissait pas. Comme réponse à NON MERCI de sa parole, Jésus nous offre sa sérénité, sa vulnérabilité inguérissable, sa miséricorde. Jésus a caché sa puissance sous sa vulnérabilité, dit Martin Luther. Contrairement à nous, Jésus est à l’aise avec son impuissance.
À l’exception de Nicodème, rares sont ceux qui discernent à travers son imprenable solidarité et son souci des autres, son intense vie intérieure, son union intime avec le Père. Peu voit qu’il est habité par Dieu, qu’il vient de Dieu (Joseph Moingt). Devant nous un Dieu qui a tellement été vaincu, rabaissé qu'au terme de sa vie, il ne valait pas plus que trente deniers. Et il s'est trouvé quelqu'un pour clamer que c'était trop cher.
Jésus a fait de sa vie une hostie (Maurice Zundel). Il a transfiguré le quotidien, l’a divinisé, l’a élevé pour qu’il n’y ait plus cette séparation, cette distanciation entre nous. Entre nous et Lui. Avec lui, le ciel est sur la terre et la terre est le parvis du ciel, de l’au-delà. Avec lui, le visible qui nous affecte tant, cache son invisible Présence. Posons notre regard (Claire d’Assise) sur Jésus allant vers sa mort et notre quotidien deviendra plus facile à vivre. Les soldats ont vraiment compris que personne n’a parlé comme Jésus.
Les jours saints qui s’ouvrent sont un appel à devenir hostie pour notre monde. C’est votre mission de moniales d’être et je cite à nouveau Maurice Zundel, des ostensoirs de sa divinité. Amen.
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