2017-B-Lc 2, 36-40 -samedi octave Noël- éloge de la patience
Année B : samedi de l’octave de Noël (litbn00s.17)
Luc 2, 36-40 : éloge de la patience
Nous ne sommes pas créés pour rendre service à Dieu. Nous sommes créés pour le contempler. Et Luc nous présente la couleur de sa contemplation. Elle passe par un langage inclusif. Il associe toujours une femme à sa contemplation de la bonne nouvelle. Ce matin, c’est Anne, âgée de 84 ans. Au terme de son évangile, il associera une autre femme, Marie-Madeleine, celle à qui Jésus s’est révélé comme une source d’eau vive. Ces deux femmes sont sur leur terrain, des grands-mères qui nous tracent un chemin de rencontre avec Jésus.
Comment ? En demeurant en marche. En éveil. Elles guettaient l’arrivée de quelqu’un. Elles ont vu de leurs propres yeux le Seigneur qui revient de Sion et ont poussé des cris de joie (Is 52, 8).
Guetter l’aurore, voilà qui exige patience et capacité d’attendre. Aujourd’hui, tout repose sur la vitesse, l’instantané. Tout doit être «en direct». On parle même de la barbarie de l’immédiateté[1]. De l’accélération accélérante[2]. Notre monde est intoxiqué par la hâte. L’impatience ronge les cœurs et la tentation d’avoir peur de ne pas être moderne conduit à maquiller Noël. Elle nous fait chercher le salut dans l’éphémère de moment et de la mondanité. Tout ce qu’il y a dans le monde, la convoitise des yeux, l’arrogance de la richesse, tout cela ne vient pas du Père (1 Jn 2, 16).
Noël peut être séduisant même et surtout sans maquillage, si nous savons y voir qu’une autre manière, une manière nécessaire de vivre est possible; celle où la patience d’attendre est couronnée par une rencontre tellement salutaire qu’elle pousse à louer Dieu et à parler de l’enfant à tous ceux qui attendent la délivrance d’Israël (Lc 2, 28). Telle est la foi de Noël : parler d’un enfant sans puissance, sans armée, d’un enfant qui grandit et se fortifie (cf. Lc 2, 40) dans un village sans renommée de la Galilée.
Qu’il est beau ce jour de la rencontre dans le temple; c'est l’aboutissement d’un long temps de patience et d’attente ! Qu’elle est belle cette rencontre d’Anne, la contemplative ! Mais en ressentons-nous la beauté ? Ressentons-nous l’émerveillement de cette grand-mère à rencontrer Jésus, à le voir de ses yeux ? Ressentons-nous l’émerveillement en ceux qui affirment que la naissance de Jésus, c’est quelque chose de beau, que c’est un Homme-Dieu qui nous dit : ce que je suis, tu seras ; ce que tu es, je fus ?
Pour éviter de devenir des zombis qui ne conservent de Noël qu’une gentillesse sans lien direct avec sa vraie bonne nouvelle, Anne autant que Marie-Madeleine nous proposent de nous tenir en marche, en état de déplacement. Elles ont refusé de vivre enfermées sur elles-mêmes en se tenant jour et nuit en prière qui est une sortie de soi. Noël se découvre en marchant. Lorsqu’on marche, qu’on sort de soi, on rencontre l’Autre.
Le Seigneur entre dans son temple, nos cœurs, saurons-nous le recevoir ? Les siens ne l’ont pas reçu (Jn 1, 11).
À votre contemplation : cet enfant n’est pas «semblable» aux enfants. Il est cet enfant. Cessons de le maquiller. Aujourd’hui, il est plus facile de maquiller Noël que de rendre belle cette naissance. Rendons beau cet enfant porté au temple par ses parents. Il n’est pas un danger. Il est en danger. Puissions-nous apprendre à parler de l’Enfant à tous ceux que nous rencontrons. Et le glaive dont parle Syméon n’est-il pas aujourd’hui de maquiller la beauté de cet enfant en lui enlevant sa mission de «pontifex», de pont entre le Père et nous. Amen.