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Les défis de la famille, selon le pape François

Date: 
Mardi, 31 mai, 2016 - 09:00

Frédéric Barriault,  Communications et Société

 

Dans le deuxième chapitre de La joie de l’amour, le pape dresse un portrait de la situation de la famille, en 2016. Les couples et les familles catholiques font en effet face à de nombreux défis dans le monde d’aujourd’hui. Nous vivons dans des sociétés individualistes et matérialistes au sein desquelles chaque personne estime être le centre du monde. Nous vivons aussi dans une « culture de la possession, de la jouissance » et du jetable après usage. Ce qui a des impacts néfastes sur la vie de famille, qui n’est plus guère qu’un « lieu de passage, auquel on a recours quand cela semble nous convenir » et où l’on prend ce que l’on veut au gré de « nos désirs et des circonstances ». Tout cela remet en question l’idée même du mariage chrétien, lequel repose sur un engagement total, exclusif, stable et durable. D’où l’hésitation d’un grand nombre de jeunes à se marier, le mariage leur semblant être un « piège », de même qu’un obstacle à leur soif de liberté et de jouissance.

 

Les chrétiens doivent évidemment continuer de faire la promotion du mariage, même si c’est à contre-courant dans des sociétés comme la nôtre. Cela dit, ajoute le pape, il serait inutile et insuffisant de se contenter de dénoncer « l’effondrement » du mariage. Pour la simple et bonne raison qu’on ne peut plus « imposer des normes de conduite » de manière autoritaire. Il faut plutôt faire un « effort plus responsable et généreux » afin de « présenter les raisons et les motivations d’opter pour le mariage et la famille ».

 

Aux yeux du pape, l’Église doit d’ailleurs faire son autocritique, puisqu’elle a trop longtemps insisté « sur le devoir de la procréation » et pas assez sur les aspects les plus nobles du mariage, c’est-à-dire « l’appel à grandir dans l’amour et l’idéal de soutien mutuel ». L’Église n’a pas suffisamment accompagné les couples au cours des premières années de leur vie conjugale, ni d’ailleurs adapté les sessions de préparation au mariage à la réalité concrète et au « langage » des couples d’aujourd’hui. En proposant une idéal de vie quasi inaccessible pour le commun des mortels, l’Église a rendu le mariage peu attirant pour les jeunes. Il est donc essentiel que l’Église mette en place une pastorale du mariage « positive, accueillante », qui rende possible « un approfondissement progressif des exigences de l’Évangile ». Selon le pape, l’Église doit « trouver les mots, les motivations et les témoins qui nous aident à toucher les fibres les plus profondes des jeunes, là où ils sont le plus capables de générosité, d’engagement, d’amour et même d’héroïsme, pour les inviter à accepter avec enthousiasme et courage le défi du mariage. »

 

Ce défi n’est certes pas facile à relever car toutes sortes d’obstacles se dressent sur la route des couples chrétiens. Pauvreté, chômage, guerres, migrations, précarité économique : tout cela peut amener les jeunes à remettre à plus tard l’idée de se marier. D’autant qu’ils vivent dans des sociétés où le concubinage, le divorce et les unions libres font partie des mœurs. Confrontés quotidiennement à l’échec de dizaines de couples et de mariages, les jeunes en viennent à voir le mariage comme quelque chose de « trop grand et trop sacré » pour eux, ou, à l’inverse de trop « institutionnel et bureaucratique ». Ces couples subissent également l’influence d’une « conception purement émotionnelle et romantique de l’amour », ce qui les amène à passer d’une relation à une autre — ou à se divorcer dès que leur couple affronte la moindre crise. Or, aux yeux du pape, le mariage et l’amour supposent « avoir le courage de la patience, de la remise en question, du pardon mutuel, de la réconciliation et même du sacrifice ».

 

Ajoutons-y l’influence « d’idéologies qui dévaluent le mariage et la famille », sans oublier le rôle néfaste de la pornographie, de la prostitution, de la contraception, de l’avortement, de la violence conjugale. Tout cela engendre dans son sillage des familles brisées et des enfants abandonnés.

 

Le pape invite d’ailleurs l’Église à faire preuve d’ouverture et de sollicitude à l’égard de ces familles brisées, lesquelles « se sentent jugées et abandonnées par cette Mère qui est [plutôt] appelée à les entourer de la miséricorde de Dieu […] et à leur offrir la force régénératrice de la grâce et la lumière de l’Évangile ».